Archéologie du sujet, vol. 2. La quête de l'identité

Archéologie du sujet, vol. 2. La quête de l'identité
de Libera Alain
Ed. Vrin

Qu'est-ce qui constitue le Moi? Ce qui dit « Je » à présent est-il le même qu'à l'instant passé ou à venir? Depuis l'Âge classique, la philosophie s'interroge sur la permanence du moi individuel. Dans cette quête de l'identité, le sujet semble s'être décisivement effacé devant le Self et la Person. Il subsiste pourtant sous le masque de personne, à la rencontre de deux schèmes théoriques forgés dans la pensée antique et médiévale : la subjectité et l'attributivisme. Prenant pour fil conducteur les questionnaires sur l'identité personnelle de la philosophie contemporaine (Strawson, Rorty), on étudie ici sur la longue durée, avec les outils de Naissance du sujet, quelques figures remarquables du double parasitage du sujet et de la personne, d'où est issue la notion moderne de sujet personnel. Du problème médiéval du baptême des siamois à celui, lockéen, des personnalités multiples ou des corps en multipropriété, en passant par ceux du bateau de Thésée et des Jumelles de Bohème, cette archéologie du sujet non cartésien emprunte une série d'itinéraires imprévus où la théologie des sacrements croise la satire philosophique; la philosophie de l'esprit côtoie la métempsycose; les quodlibets médiévaux, Martin Scribbler et les gazettes londoniennes du XVIIIe siècle; l'être objectif des scolastiques, la dénomination externe des critiques de Locke. De Thomas d'Aquin, Henri de Gand et Duns Scot à Leibniz, Clarke, Butler et Reid, de la Seconde Scolastique à Catharine Trotter, Swift et Pope, de Suárez et Cajétan à Brentano et Heidegger, une série d'intrigues (Paul Veyne) se tisse, où le sujet, d'abord simple récepteur passif, accède à la condition personnelle d'agent, comptable de ses pensées tout comme de ses actions.

De beaux rêves. Obstacles philosophiques à une science de la conscience

De beaux rêves. Obstacles philosophiques à une science de la conscience
Dennett Daniel Clement
Ed. Eclat

La conscience est un champ de bataille où s'affrontent les idées, en un tumulte sur lequel planent encore, après des siècles, les ombres du Théâtre Cartésien. Les certitudes en apparence les plus fortes continuent de dispenser un brouillard que Daniel Dennett s'efforce allègrement de dissiper en s'attaquant aux contresens ou aux pseudo-évidences dont la plupart des débats sont inutilement encombrés. Abandonnant le rêveur à ses rêves et le magicien à sa magie, Daniel Dennett poursuit ici, après La Conscience, expliquée, une entreprise de clarification qui tourne le dos aux convictions les plus tenaces, en faisant appel à un modèle qui ne s'en laisse pas conter, celui de la «célébrité dans le cerveau». «Dans le cerveau, pas de Roi, pas de Contrôleur officiel des programmes de la télévision d'État», écrit-il. La démocratie et l'anarchie y sont autrement plus actives et efficaces. La conscience n'est pas un «médium de représentation. Elle a bien plus d'affinités avec le monde de la célébrité qu'avec celui du médium télévisuel».

Avicenne et la gauche aristotélicienne

Avicenne et la gauche aristotélicienne
Bloch Ernst
Ed. Premières pierres

Grand penseur de l'utopie, Ernst Bloch (1885-1977) a aussi élaboré une philosophie spéculative de la nature et un concept de matière auxquels on n'a que rarement prêté attention. Pourtant, chez l'auteur du Principe Espérance, utopie et matière renvoient l'une à l'autre, ce qu'annonçait déjà la célèbre sentence de Marx : «La société [à venir] est l'achèvement de l'unité essentielle de l'homme avec la nature, la vraie résurrection de la nature, le naturalisme accompli de l'homme et l'humanisme accompli de la nature.»

Pour fonder ces connexions, Bloch a approfondi la catégorie de la possibilité et en a énoncé l'enjeu : la transformation du monde. Mais d'où la possibilité surgit-elle ? Partant de l'assimilation par Aristote de la possibilité avec la matière, Bloch a voulu établir la généalogie de sa propre réponse, en repérant les métamorphoses successives des relations forme matière opérées par ceux qu'il nomme les aristotéliciens de gauche ou matérialistes panthéistes, et dont les grandes figures seront Avicenne, Averroès, Avicébron, Giordano Bruno, et Goethe. Au terme du processus s'esquisse le concept blochien de matière féconde, aussi éloignée de celle des théologiens, qui tient son principe d'un sujet transcendant, que de celle, dépourvue de vie ou de «raisons de déterminations purement internes» (Kant), des mécanistes.

La publication en 1952 d'Avicenne et la gauche aristotélicienne dont nous donnons la première traduction en français eut très vite un fort retentissement : enthousiasme des tenants des Lumières arabes, critiques parfois virulentes de certains historiens de la philosophie, embarras jusque parmi les «blochiens» face à un «morceau de bravoure» au statut théorique complexe.

Le monde des sphères, vol. 1. Genèse et triomphe d'une représentation cosmique

Le monde des sphères, vol. 1. Genèse et triomphe d'une représentation cosmique
Lerner Michel-Pierre
Ed. Belles lettres

Ce livre est la première étude d'ensemble consacrée aux sphères célestes, depuis leur invention par les Grecs au IVe siècle avant J.-C., jusqu'à leur disparition à l'aube des temps modernes.

Pendant de longs siècles, d'étranges objets peuplant l'immense espace compris entre la lune et le firmament étoilé ont évolué dans le ciel et fait tourner la fabrique du monde.

La prise en compte de ces corps constitutifs de la machinerie du ciel relève d'abord de l'astronomie physique, mais leur existence concerne plus encore, pendant la période médiévale, les philosophes - il leur incombe notamment d'en scruter l'essence mystérieuse et d'en imaginer les propriétés -, ainsi que les théologiens, qui inscrivent toute l'économie du salut dans l'édifice cosmique auquel ils ont ajouté la couronne du ciel empyrée.

C'est à étudier la naissance et la vie des sphères célestes, ces êtres singuliers et improbables que jamais oeil humain ne vit, ni oreille n'entendit, que le lecteur est ici invité.

Le monde des sphères, vol. 2. La fin du cosmos classique

Le monde des sphères, vol. 2. La fin du cosmos classique
Lerner Michel-Pierre
Ed. Belles lettres

Deuxième partie du Monde des sphères, La Fin du cosmos classique a pour objet la mort des sphères célestes, dont la naissance et la vie ont été étudiées dans le premier tome.

Les orbes porteurs des planètes ont été les premiers à disparaître de la machinerie du ciel, lorsque leur existence s'est trouvée contredite par une série de phénomènes célestes spectaculaires. L'étude du débat passionné qui mit aux prises les meilleurs astronomes, dans le dernier quart du XVIe siècle, est l'occasion d'un réexamen du rôle central que l'historiographie a prêté jusqu'ici à Tycho Brahe.

La sphère des fixes, elle, a résisté plus longtemps. Bien que théoriquement sans nécessité dans les systèmes prônant la mobilité de la terre, certains auteurs l'ont conservée parce qu'elle leur permettait de penser encore le monde comme totalité une et ordonnée. En ce sens, Copernic et Kepler sont restés fidèles à la figure idéale du cosmos héritée des Grecs. En revanche, Bruno, Gilbert, Galilée et Descartes, pour d'autres raisons philosophiques ou théologiques, n'ont pas hésité à faire éclater l'enveloppe protectrice du monde, et à affronter en pensée un univers immense, sans forme ni limite, expression nécessaire, ou seulement probable, de la puissance infinie de Dieu.

Discours sur le colonialisme suivi de Discours sur la Négritude

Discours sur le colonialisme suivi de Discours sur la Négritude
Césaire Aimé
Ed. Présence Africaine

Comme naguère Jean-Jacques Rousseau dénonçait le scandale d'une société fondée sur l'inégalité, avec la même clarté, et un bonheur d'écriture que seule peut inspirer la passion du juste, Aimé Césaire prend ses distance par rapport au monde occidental et le juge.
Ce discours est un acte d'accusation et de libération. Sont assignés quelques ténors de la civilisation blanche et de son idéologie mystifiante, l'Humanisme formel et froid. En pleine lumière sont exposées d'horribles réalités : la barbarie du colonisateur et le malheur du colonisé, le fait même de la colonisation qui n'est qu'une machine exploiteuse d'hommes et déshumanisante, une machine à détruire des civilisations qui étaient belles, dignes et fraternelles. C'est la première fois qu'avec cette force est proclamée, face à l'Occident, la valeur des cultures nègres.
Mais la violence de la pureté du cri sont à la mesure d'une grande exigence, ce texte chaud, à chaque instant, témoigne du souci des hommes, d'une authentique universalité humaine. Il s'inscrit dans la lignée de ces textes majeurs qui ne cessent de réveiller en chacun de nous la générosité de la lucidité révolutionnaires.

Un destin philosophique ou les pièges de la croyance

Un destin philosophique ou les pièges de la croyance
Desanti Jean-Toussaint
Ed. Pluriel

Dans cet ouvrage, Jean-Toussaint Desanti retrace, en réponse à un questionnement de Maurice Clavel, ce que fut son parcours philosophique et politique, au carrefour des réflexions phénoménologiques de Husserl puis de Merleau-Ponty, de la réflexion sur le statut des mathématiques (qui ne sont, disait-il, «ni du ciel, ni de la terre») et l'engagement politique. Avec une grande clarté, il y procède parfois à des rapprochements surprenants, mais éclairants, comme celui qui le conduit à voir dans la conception communiste du parti politique l'équivalent de ce qu'est dans la philosophie de la connaissance l'idée du sujet transcendantal. Il élucide ainsi avec rigueur la part de croyance qui nous accompagne dans nos engagements, et qui fonde à la fois nos convictions, nos vérités et nos illusions.

Le philosophe et les pouvoirs et autres dialogues

Le philosophe et les pouvoirs et autres dialogues
Desanti Jean-Toussaint
Ed. Pluriel

Publié en 1976, Le Philosophe et les pouvoirs révélait au grand public le nom de Jean-Toussaint Desanti, auteur jusque-là d'essais philosophiques très techniques et d'articles militants dans les années cinquante. Pour la première fois, il rompt le silence qu'il s'était imposé depuis 1956, et livre une analyse des illusions qui l'ont conduit au dogmatisme communiste. Il réfléchit à ce que devraient être les règles de conduite de l'intellectuel face aux pouvoirs. Interrogé avec pertinence par Pascal Lainé et Blandine Kriegel, il répond sans détours, avec une grande clarté, aux questions qu'ils posent.

Ce livre, qui manifeste la capacité de dialogue du philosophe, est suivi de nombreux entretiens, avec différents interlocuteurs, rassemblés ici pour la première fois. J.-T. Desanti revient, pour les préciser, sur ses conceptions de la tâche du philosophe et de l'élucidation philosophique.

Qu'est-ce qu'une émotion ?

Qu'est-ce qu'une émotion ?
Julien A. Deonna & Fabrice Teroni
Ed. Vrin/Chemins philosophiques

¤ Qu'est-ce qu'une émotion ?

- Comment distinguer émotions, humeurs, sentiments et désirs ?
- Existe-t-il une unité au sein du domaine des émotions ?
- Quels sont les rapports entre émotion et cognition ?
- Quels rôles jouent les sensations corporelles dans les émotions ?
- Comment comprendre l'intentionnalité affective ?

¤ Commentaire

« Les valeurs et les émotions »
David Hume
Enquête sur les principes de la morale. Appendice 1

« Les émotions morales »
John Rawls
Théorie de la justice, §73

Vérité de la démocratie

Vérité de la démocratie
Nancy Jean-Luc
Ed. Galilée

C'est à la politique en elle-même et au capitalisme en lui-même que s'adressait le mouvement profond de 68. C'est à la démocratie gestionnaire que s'en prenait sa véhémence et, plus avant encore, c'est une interrogation sur la vérité de la démocratie qui s'y ébauchait.

La vérité de la démocratie est celle-ci : elle n'est pas une forme politique parmi d'autres, à la différence de ce qu'elle fut pour les Anciens. Elle n'est pas une forme politique du tout, ou bien et à tout le moins n'est-elle pas d'abord une forme politique.

« Démocratie » est d'abord le nom d'un régime de sens dont la vérité ne peut être subsumée sous aucune instance ordonnatrice ou gouvernante mais qui engage entièrement l'« homme » en tant que risque et chance de « lui-même ». Ce premier sens n'emprunte un nom politique que de manière accidentelle et provisoire.

Ensuite, « démocratie » dit le devoir d'inventer la politique non pas comme ordre des fins mais des moyens d'ouvrir et de garder des espaces pour les inventer. Cette distinction des fins et des moyens n'est pas donnée, pas plus que la distribution des « espaces » possibles. Il s'agit de les trouver, voire d'inventer comment ne même pas prétendre les trouver. Cette politique doit être tenue distincte de l'ordre des fins - même si la justice sociale constitue d'évidence un moyen nécessaire à toutes fins possibles.

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