Quatorze écrivains et stylistes brossent le portrait d'hommes qui, selon eux, incarnent l'élégance masculine : le prince Charles, J.-P. Melville, D. Rochline, R. Federer, C. Grant, J. Belmonte, entre autres.
L'identité photographique d'une ville ou d'un pays n'est jamais anodine. Si Paris, Londres, New York, la France, les États-Unis et bien d'autres bénéficient, de ce point de vue, d'un traitement privilégié, la Belgique a rarement fait l'objet de créations d'auteur, à l'exception peut-être de Bruxelles. La Belgique, l'air de rien, copieux livre imaginé par le photographe français Bernard Plossu, avec la diversité de ses images et leur cohérence stylistique, parcourt Bruxelles, Liège, Charleroi, Anvers, la mer du Nord, les régions agricoles.
Ce sont des images cinématographiques, travellings suggérés par les câbles des caténaires, les rails de tram luisants. Ce sont des compositions architecturales, involontaires (le métro de Charleroi) ou parfaitement maîtrisées (la gare des Guillemins à Liège). Ce sont des vues à travers la vitre d'un train, d'une voiture. C'est la lumière, entre chien et loup, quand l'encore pâle lueur des phares se démultiplie sur les chaussées rendues glissantes par la pluie. La Belgique de Plossu est conforme à celle des Belges : ensoleillée et pluvieuse, parfois au même moment.
Biographie de la photographe V. Maier (1926-2009) qui retrace son enfance dans la vallée du Champsaur des années 1930, en passant par l'adolescence au sein d'une famille en pleine crise, et son parcours artistique bravant tous les usages de la société américaine des années 1950. L'auteure explore ainsi toutes les facettes de la personnalité de l'artiste.
Cela commence, en octobre 1880, comme une scène de roman : la visite du grand homme à l'atelier du jeune peintre, qui dès lors nouera avec son aîné les liens d'une amitié qui durera près de trente ans.
C'est ainsi qu'Ilia Répine, destiné à devenir l'artiste russe le plus célèbre du XIXe siècle, fit la connaissance de Léon Tolstoï, qu'il fut admis dans le cercle de sa famille et fit de fréquents séjours dans le fameux domaine d'Iasnaïa Poliana : il y puisera, au fil de ses souvenirs, la matière de merveilleux croquis de la vie russe où Tolstoï se révèle dans toute son énergie et sa sensibilité - travail aux champs, cavalcades en forêt, courses en traîneau dans un paysage de neige... C'est ainsi, également, qu'il fit la connaissance de la jeune Tatiana et qu'il entretint avec elle une correspondance où l'on peut suivre tous les méandres d'une inclination amoureuse qui ne dit pas son nom, un marivaudage nourri de confidences où défile la bonne société de l'époque, mécènes, artistes, politiques : Répine s'y livre totalement, dans son caractère mouvant, enthousiaste, séducteur, à l'image de l'oeuvre prolifique qu'il nous a laissé, relevant aussi bien de la peinture d'histoire que des scènes de genre, des portraits officiels que des représentations intimistes, excellant toujours dans une variété de styles stupéfiante, à laquelle ces lettres constituent une excellente introduction.
« Dans ses cinquante années de peinture, Picabia a constamment évité de s'attacher à une formule quelconque ou de porter un insigne. On pourrait l'appeler le plus grand représentant de la liberté en art, non seulement à l'encontre de l'esclavage des académies, mais aussi contre la soumission à quelque dogme que ce soit. »
Ces remarques de Marcel Duchamp soulignent la dimension profondément libertaire de celui qui aimait se qualifier d'« artiste en tous genres ».
Ce parcours chaotique, contradictoire, fait d'allers et retours permanents entre abstraction et figuration, géométrie et biomorphisme, onirisme et réalisme, ne saurait être appréhendé de façon simplement formelle. Il demeure difficile d'identifier un style ou une manière Picabia. Ce qu'une approche biographique nous permet a contrario de comprendre, c'est précisément une certaine constance dans l'attitude. Ce fils de famille « né sans mère », aux goûts de luxe particulièrement prononcés et à la vie psychique et conjugale agitée, n'est en effet pas à une contradiction près. Francis Picabia n'abhorre rien tant que l'idéal de pureté et d'intransigeance qu'il voit poindre chez ses amis dadaïstes et même chez André Breton.
Pendant l'entre-deux-guerres, Henri Béraud fut l'une des stars du grand reportage - l'un des plus lus, l'un des plus célèbres, et peut-être le plus talentueux d'une génération où se côtoient Kessel, Londres, Morand, Cendrars et Simenon. Cette anthologie réunit une sélection de ses meilleurs articles publiés entre 1919 et 1933 : sous la plume vive et mordante du journaliste, nous assistons à la guerre d'indépendance irlandaise, à la construction de l'Union soviétique et de la Turquie kémaliste, à la marche des fascistes sur Rome, à la montée du nazisme... Béraud, initialement engagé à gauche, fut à cet égard l'un des premiers à percevoir puis dénoncer l'essor des totalitarismes. Mais alors comment expliquer que le même homme, dans la deuxième moitié des années 1930, ait basculé sur une pente inverse, jusqu'à être condamné pour collaboration en 1944 ? Relire le Béraud « première période », c'est ainsi redécouvrir un immense écrivain, mais aussi se plonger dans les remous d'une Europe en crise vue à travers le regard de l'un de ses plus fins observateurs. (présentation de l'éditeur)
« Cru. Parfois, sur la grille, seul un tableau respire, c'est Un atelier aux Batignolles de Fantin-Latour, et c'est fou de le voir ainsi, sans l'ennoblissement de la salle d'exposition, sans la mise en scène, l'éclairage, la distance, sans les voisins adéquats. La réalité de la toile y est plus puissante, sa surface plus présente, sa matière plus tangible. Comme si l'oeuvre était nue. Tout me paraît plus concret dans les réserves. Âpre et cru. »
Maylis de Kerangal
Invités par le musée d'Orsay à revisiter ses collections, Maylis de Kerangal et Jean-Philippe Delhomme ont eu l'occasion d'arpenter les réserves de l'institution, lieu secret où sont conservées les oeuvres quand elles ne sont pas visibles du public.
La saga des Camondo, de l'Inquisition espagnole au génocide nazi, n'est pas seulement un récit historique retraçant l'épopée de ces grands seigneurs séfarades. C'est aussi une méditation sur la solitude d'un homme abandonné par sa femme, inconsolé de la mort de son fils, qui consacra sa vie et sa fortune à reconstituer au coeur de la plaine Monceau une demeure aristocratique du XVIIIe siècle, devenue le musée Nissim de Camondo.
« Tout a commencé le jour où je me suis rendu dans une administration fiscale, et où un volumineux employé m'a expliqué avec une patience d'ange comment remplir des imprimés auxquels je ne comprenais rien.
Comme c'était bientôt l'heure de la fermeture, je lui ai proposé, pour le remercier, d'aller boire un verre au bar d'en face, ce qu'il accepta avec joie.
On l'appelait Bouboule depuis l'enfance, et il ne semblait pas malheureux, malgré sa solitude et sa corpulence. Mais il finit par m'avouer qu'être aussi gros lui pesait trop, et qu'il avait pris la décision de se balancer depuis la fenêtre de son huitième étage le jour où il pèserait 180 kilos. Il en pesait alors 177.
Elles peuvent être grandes ou petites, luxueuses ou sobres. Elles peuvent avoir des murs et un toit ou être faites de tissu. Pourtant, ces artefacts qui nous accompagnent depuis des milliers d'années ont toujours le même objectif : le bonheur. Nous construisons des maisons pour vivre mieux : l'essence de chaque maison réside dans cet adverbe. Le fondement de chaque maison est moral, et non purement esthétique ou architectural. Une domestication réciproque entre les choses et les personnes : nous érigeons des murs, nous accumulons des choses, nous nous aimons et prenons soin de nos partenaires et de nos enfants.