Bicentenaire

Bicentenaire
Trouillot Lyonel
Ed. Actes Sud

Port-au-Prince, début 2004 - année du bicentenaire de l'indépendance d'Haïti. En cette matinée dominicale, un jeune homme quitte les quartiers pauvres pour rejoindre la manifestation organisée en ville par les étudiants. Au fil de sa marche, Lucien refait en esprit le trajet qui l'a conduit du village de l'enfance vers la ville à l'improbable avenir. Les voix aimées et irréconciliables résonnent dans sa tête : celle de sa mère, paysanne d'une province reculée ; celle de son frère qui a mal tourné au contact de la ville ; celle de « l'Etrangère », une journaliste qu'il aime sans vraiment la connaître ; celles, enfin, de ses camarades étudiants ou de voisins. Le roman est le récit de sa journée - de sa descente vers la ville jusqu'à l'ultime charge de la police...

Né de la nécessité profonde et urgente, pour son auteur, de rendre compte des événements qui ensanglantèrent les célébrations de ce bicentenaire, ce roman incandescent affirme une nouvelle fois que la littérature, transcendant le commentaire, est sans doute l'un des plus puissants antidotes au chaos.

La peste écarlate

La peste écarlate
London Jack
Ed. Actes Sud

Un ancien professeur d'université erre en compagnie de ses petits-enfants, revêtus de peaux de bêtes, dans un paysage désolé. Celui de la baie de San Francisco, ravagée soixante ans auparavant par un terrible fléau. Nous sommes en 2013. Quelques hordes subsistent, et de rares survivants tentent de raconter le monde d'avant à des enfants qui ne savent même pas compter. La seule issue est de reprendre depuis les commencements la marche vers la civilisation perdue. Jack London met toute sa puissance d'évocation au service de ce récit d'apocalypse, offrant de ces grandes peurs qui ravagent le monde une vision terrible - et quasi prophétique - et inscrivant de fait sa peste écarlate dans la lignée des fléaux bibliques, des terreurs millénaristes. Un texte qui prend dès lors une étonnante et inquiétante modernité.

Le motif dans le tapis

Le motif dans le tapis
James Henry
Ed. Actes Sud

Après que le maître lui eut révélé l'existence d'un 'motif' dans son oeuvre, un jeune critique littéraire londonien n'a de cesse que de relever le défi, d'élucider le mystère. La quête inlassable du 'tuyau' qui permettrait de comprendre le sens profond de l'oeuvre du grand Hugh Vereker se transforme bientôt en une véritable obsession, pour lui, pour son ami Corvick, critique lui aussi, et pour la jeune femme de celui-ci. S'ensuit un enchaînement extraordinaire d'événements, de voyages et de péripéties, conséquences d'une enquête quasi policière...

C'est à vrai dire une brillante variation sur la lecture et sur le rôle de la critique que cette énigme littéraire mise en scène par Henry James.

Infrarouge

Infrarouge
Huston Nancy
Ed. Actes Sud

Artiste et reporter-photographe, Rena Greenblatt rejoint à Florence son père Simon et sa belle-mère Ingrid pour une semaine de promenades parmi les splendeurs de la Renaissance. Naguère scientifique brillant, Simon est désormais un homme fatigué à l'élocution hésitante, et sa femme semble peu réceptive aux chefs-d'oeuvre toscans. Le couple traîne la patte. Et Rena, toute au regret de Paris et de son jeune amant Aziz, s'impatiente. Alors lui viennent quantité de souvenirs, fantasmes et pensées secrètes qu'elle ne peut partager qu'avec Subra, son 'amie spéciale', son invisible confidente. Seule Subra sait à quels infrarouges réagit Rena : désir et déchirements de la maternité, beauté et liberté du sexe, émotion devant les corps masculins qu'elle adore photographier dans l'abandon de la jouissance...

Par des chapitres vifs et brefs mêlant présent et passé, Infrarouge raconte deux voyages : celui, désopilant, de vacances ratées, et celui, plus sombre et passionné, qui explore les liens et les conflits familiaux, les codes féminin et masculin, les archétypes trompeurs et les vérités inavouées.

Mon ange

Mon ange
Rosales Guillermo
Ed. Actes Sud

Livre échangé sous le manteau, longtemps introuvable dans sa langue d'origine, Mon ange a été instrumentalisé par les Cubains des deux rives afin de le réduire à un sommaire règlement de comptes. L'histoire de sa publication serait simplement romanesque, si son contenu n'était dramatiquement testamentaire.

Un écrivain qui a fui le régime carcéral insulaire refuse la reddition sans condition à la sphère étriquée des «triomphateurs» qui l'attendent à Miami. Il est interné par sa famille «américaine» dans un boarding home, asile privé qui recueille des inadaptés de toute engeance.

Les grilles se referment sur lui et en lui, seul dans un univers hallucinant où l'on ne peut que souffrir et faire souffrir. C'est ici qu'il faut vivre, et pour toujours, sans espérance ni pitié; pour personne. Le faut-il vraiment?

Du sang dans les plumes

Du sang dans les plumes
Williams Joel
Ed. Pulse/13e note

Au carrefour de la tradition amérindienne et de la littérature de prison, de l'humour et de la poésie, Joel Williams, le boxeur guitariste, nous fait partager les hantises mais aussi les espoirs qui rythment ses journées : tentation de la folie et de l'autodestruction, méfiance, violence, trafics, rivalités de gangs, recherche des racines ethniques, survie face à la mesquinerie et aux humiliations, défoulement dans le sport, obsession sexuelle, image de la Femme tentatrice, salut par l'art...

Dieu bénisse l'Amérique

Dieu bénisse l'Amérique
SaFranko Mark
Ed. Pulse/13e note

Après Putain d'Olivia, hymne aux amours vénéneuses, après Confessions d'un loser, requiem pour un séducteur malheureux, Max Zajack, alter ego de l'auteur, revient sur son enfance d'immigré polonais né à Trenton (New Jersey) du mauvais côté du rêve américain. Un éblouissant roman d'apprentissage, picaresque, tragicomique.

« Tous les gestes sacrés - tenir la patène qui renfermait les hosties, agiter l'encensoir, porter le crucifix -, Je les exécutais avec une trique monstrueuse. J'avais remarqué que ma queue dessinait une courbe descendante lorsque je bandais, comme un sabre inversé. Était-ce bon ou mauvais signe ? Normal ou anormal ? Je continuais de me branler partout où je le pouvais, même si je tirais toujours à blanc. Et quand j'étais pas occupé à me faire reluire, j'en rêvais... »

« Dieu bénisse l'Amérique est un pavé de vie animale, un quartier de bidoche qu'on s'attend presque à voir bouger, tant le style prend au ventre, triture et rassasie. [...] Il y a quelque chose de Bukowski ou de Miller dans sa prose : de l'oral, du brutal, du vrai. »
Laurent Boscq, Rolling Stone

Sempre Susan. Souvenirs sur Sontag

Sempre Susan. Souvenirs sur Sontag
Nunez Sigrid
Ed. Pulse/13e note

Un jour de 1976, Sigrid Nunez pousse la porte du 340 Riverside Drive, appartement où vit, écrit, souffre et pense une icône de l'intelligentsia new-yorkaise, Susan Sontag. Cette rencontre changera sa vie. Entre hommage et témoignage, en voici le récit.

« - Pendant que j'écrivais les dernières pages de mon roman Le Bienfaiteur, je n'ai ni mangé ni dormi ni changé de vêtements pendant plusieurs jours. À la fin, je ne pouvais même plus m'interrompre pour allumer mes cigarettes. J'ai demandé à David de rester dans mon bureau et de le faire à ma place pendant que je tapais à la machine.
C'était en 1962. David avait dix ans. Susan n'avait rien d'une maman. »

« L'un des meilleurs textes sur Sontag. » Edmund White

Cocaïne, manuel de l'usager

Cocaïne, manuel de l'usager
Herbert Julian
Ed. Pulse/13e note

Au fil de cette anti-épopée, Julián Herbert drape la réalité crue et désespérée du Mexique contemporain dans une atmosphère de conte fantastique urbain.

«Appelez-moi par mon nom. Je suis installé à Baker Street. Je dépense mon argent dans le True West qui emplit et vide mes poumons. Toute bouffée d'oxygène est un cycle nasal : la corbeille pleine de Kleenex, les Kleenex pleins de sang, les Kleenex pleins de moi. J'allume mon ordinateur. Je joue au solitaire jusqu'à ce que ma main gauche soit engourdie. Puis j'essaie d'écrire. Puis je regarde l'heure : vingt minutes se sont déjà écoulées. Je vais aux toilettes, m'installe à califourchon sur la cuvette et vide sur le miroir un peu de poudre, encore un peu. Je respire son odeur, l'écrase avec ma carte de crédit Serfín et forme deux lignes bien épaisses. Je sniffe. C'est comme ça tous les jours.»

Les nuits blanches d'Edimbourg

Les nuits blanches d'Edimbourg
Graham Barry
Ed. Pulse/13e note

Ancien boxeur et fossoyeur devenu moine bouddhiste et écrivain, Barry Graham déploie en 17 nouvelles ses thèmes de prédilection : la mort, la violence, l'amour et la fugacité des relations humaines.

«Dans la chaleur de l'après-midi, je buvais mon thé parmi les hippies, femmes au foyer, schizophrènes et autres clochards. Le Cornerstone Café est un endroit sombre, aménagé au sous-sol d'une église qui se dresse devant le château d'Édimbourg. Quand il fait chaud, ils installent les tables dehors, dans le vieux cimetière. Outre des barbus et des écolos sauveurs de baleines, le Cornerstone et sa bienveillance notoire attirent une forte concentration de SDF et de fêlés du casque. On me trouvait quelque part au milieu de cette faune.»

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