Certains ont proclamé la «fin de l'Histoire». Ne serait-ce pas plutôt celle de la philosophie politique moderne qu'il conviendrait de guetter ?
Depuis cinq siècles, en effet, l'action politique a eu pour objet l'institution et la consolidation de la souveraineté, tandis que la philosophie politique structurait ses principes de gouvernement à partir de ce concept : penser la politique c'était penser la souveraineté. Or la souveraineté, née en Europe, forgée à travers les guerres qui donnèrent aux peuples le sentiment de leur particularité, s'y achève sous nos yeux, en une Union des peuples fondée désormais sur la paix, à la suite d'un génocide suicidaire.
Pour penser l'achèvement, la philosophie politique ne saurait plus se contenter de répéter ses affirmations communes sur la volonté du peuple, l'indivisibilité de la république, la dictature du prolétariat et les droits de l'homme. Aucune n'a pu fonder l'existence libre de la multitude : elles ont soit révélé dans l'histoire leur absolue contradiction en allant, parfois, jusqu'au crime, soit permis d'ouvrir le chemin de la vie libre sans être capables, cependant, de le tracer jusqu'au bout. Ces catégories ressortissent à un monde et à sa fable que les temps présents abandonnent au passé.
Le problème constitutif de la philosophie politique - les conditions de la vie libre - n'a pas disparu pour autant, mais la solution nouvelle est à inventer. Une double tâche s'impose désormais : montrer en quoi la souveraineté est achevée et ce que cela signifie, jusque dans les chemins divergents qu'empruntent l'Europe et les États-Unis ; formuler des propositions sérieuses capables d'orienter le débat politique de notre temps : quelle moralité nouvelle, autre que la souveraineté, inventer pour des peuples européens qui, faute de pouvoir encore se faire la guerre, se sont du coup, sans autre projet, abandonnés au marché ?
Présentation de l'éditeur
« Profaner c'est restituer à l'usage commun ce qui a été séparé dans la sphère du sacré. »
Cette définition offre au lecteur le fil d'Ariane qui lui permettra de s'orienter à travers les dix petites proses théoriques dans lesquelles Giorgio Agamben a recueilli les motifs les plus urgents et les plus actuels de sa pensée en une sorte d'abrégé fulgurant. Avec un bonheur retrouvé, son écriture se meut entre littérature et philosophie.
Présentation de l'éditeur
En réaction au culte de l'Absolu totalisant, hérité de la philosophie allemande, en particulier de Hegel, les penseurs anglais et américains ont voulu prendre en compte la diversité du monde sensible, et l'expérience humaine. Au tournant du siècle dernier se sont élaborées des philosophies en dehors des traditions, tout en les incorporant. Les pensées viennent se rencontrer, s'ajuster, se confronter d'un bout de l'Europe à l'autre, et de part et d'autre de l'Atlantique, autour d'une insistance sur la transformation perpétuelle et profonde du monde et de l'individu et la question du mal : l'accepter ou le combattre sans diminuer le potentiel d'action possible.
Cette grande aventure de la pensée, centrée sur le pragmatisme et le réalisme, particulièrement féconde en oeuvres majeures, fait l'objet d'une redécouverte incitant à revenir à la diversité interrogative et à la richesse des origines.
Véritable passeur vers des pensées complexes ou méconnues comme le pragmatisme de William James mais aussi le néo-réalisme, Jean Wahl nous montre que bien des « monistes » sont plus ouverts qu'il n'y paraît aux idées pluralistes. Que de philosophes à découvrir ou redécouvrir dans ce livre : Russell, Dewey, Howison ou Royce, mais aussi Bosanquet ou Bradley...
Les Philosophies pluralistes d'Angleterre et d'Amérique ont constitué une source primordiale pour la construction de la pensée de Gilles Deleuze ; elles nous donnent à voir une « autre » Amérique, pionnière, indépendante et créative, foisonnante et contradictoire, bien en phase avec notre époque avide d'approches plurielles, plus respectueuses de la diversité des individus et des cultures...
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Réédition
Qu'est-ce que le romantisme ? Essentiellement une résistance au mode de vie de la société capitaliste moderne. Sous le double éclairage de la révolte et de la mélancolie, Michaeal Lôwy et Robert Sayre montrent en effet que le romantisme s'oppose dans tous les champs (poésie, art, politique, philosophie) à la civilisation moderne engendrée par la révolution industrielle et la généralisation de l'économie de marché. Deux valeurs portent ce 'grand refus' : l'individualisme qualitatif et la recherche d'une nouvelle forme de communauté humaine.
Ce livre montre aussi que, loin d'être seulement la culture propre au XIXe siècle, la vision romantique du monde a persisté, au XXe siècle, chez des penseurs dissidents de la modernité (Péguy, Bloch) et dans le mouvement de Mai 68.
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L'aspiration à la justice est, pour le meilleur et pour le pire, une donnée anthropologique fondamentale, car les hommes ont besoin pour vivre ensemble de s'accorder sur un même sens de la vie, alors qu'elle n'en a aucun qui puisse se découvrir scientifiquement. La dogmatique juridique est la manière occidentale de lier ainsi les hommes, en posant un sens qui s'impose à tous. Le Droit est le texte où s'écrivent nos croyances fondatrices : croyance en une signification de l'être humain, en l'empire des lois ou en la force de la parole donnée. N'étant pas l'expression d'une Vérité révélée par Dieu ou découverte par la science, le Droit est aussi une technique, susceptible de servir des fins diverses et changeantes, aussi bien dans l'histoire des systèmes politiques que dans celle des sciences et des techniques. Mais c'est une technique de l'Interdit, qui interpose dans les rapports de chacun à autrui et au monde un sens commun qui le dépasse et l'oblige. Il faut en effet que chacun de nous soit assuré d'un ordre existant pour pouvoir donner sens à sa propre vie et à son action, fût-elle contestatrice.
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Mon sens commun est un petit esprit impatient et rebelle qui, depuis quelque temps, s'est réveillé en moi, parfois contre ma volonté, hérisse le poil et grogne contre l'infinie arrogance de l'intelligence, contre toutes les mises en demeure plus ou moins subtiles, plus ou moins raffinées, plus ou moins bien informées, qui veulent nous faire penser de la façon voulue, correcte et conforme, l'Art, la Société, les Valeurs, etc. ' La philosophie doit servir à cela : aider la mouche à sortir de la bouteille ' (Ludwig Wittgenstein).
Romancier et essayiste né à Naples en 1922, Raffaele La Capria fait dans ce livre l'éloge du sens commun, souvent méprisé et dévalorisé au profit des diverses ' formulations intellectuelles abstraites ' par lesquelles ' la pensée conforme ' nous explique chaque jour, ' à gauche comme à droite ', ce que nous devons penser. Loin de s'identifier à la trivialité du ' bon sens ' égoïste et matois, le sens commun est une forme de résistance à la domination. Mais cette dissension commune ' n'est pas chose aisée, puisque durant les dernières décennies un grand nombre d'hommes extrêmement intelligents ont été fascinés et dominés par un grand nombre d'idées extrêmement désastreuses engendrées par l'esprit despotique de l'époque '. À l'ère des catastrophes planétaires, revenir au sens commun signifie lutter pour reconstruire un monde qui soit à notre échelle, un monde que nous puissions dire nôtre.
Présentation de l'éditeur
Deux types d'adversaires s'affrontent en permanence sur la question de l'évolution technique : d'un côté, ceux qui pensent que cette évolution suit une logique interne, inéluctable et en somme infernale (' on n'arrête pas le progrès ') ; de l'autre, ceux qui pensent qu'aucune téléologie n'oriente inexorablement le changement et que l'homme est maître de son destin. Ces positions s'accordent toutefois sur le sens de l'expression ' évolution technique ', qui équivaudrait à ' développement autonome des techniques dans l'histoire '.
Or c'est cette définition a minima qui peut être mise en doute. Le présent livre n'a pas pour objectif de réfléchir aux grandes orientations des changements en cours ; il a pour but d'apporter un éclairage sur les significations multiples du mot même d'évolution. Non pas donc dire s'il y a, oui ou non, une évolution technique mais examiner les sens de ce ' il y a '.
Présentation de l'éditeur
Agrégé et Docteur en philosophie, Xavier Guchet enseigne à Paris. Les Sens de l'évolution technique est son premier livre.
Contrairement à une analyse largement partagée qui verrait les liens sociaux se déchirer et les valeurs se dissoudre, François Ascher défend ici l'idée que l'individualisation, la rationalisation et la différenciation sociale, qui caractérisent la modernité, engendrent des liens sociaux beaucoup plus nombreux et choisis, et font émerger de nouveaux enjeux politiques. Il nous montre que le capitalisme cognitif, tel qu'il s'impose aujourd'hui, résulte de ces transformations : cette société est moderne parce que les individus comme les organisations qui la composent prétendent maîtriser leurs actions et leur vie. Mais est-ce réellement possible dans un monde toujours plus complexe et par conséquent toujours plus incertain ?
La philosophie est, pour Merleau-Ponty, une interrogation des choses considérées dans leur apparaître ou leur phénoménalité. Sa tâche est d'exprimer de façon juste le foyer de la donation des choses, lequel, depuis le début de la philosophie moderne, est pensé comme subjectivité. Merleau-Ponty cherche ce foyer dans une phénoménologie de la perception, avant de s'orienter vers ce que ses derniers travaux appellent la 'chair'. La perception est une conscience qui s'apparaît à elle-même comme surgissant d'une nature dans laquelle elle reste aussi enveloppée et qui est donc indivisément pensée naturante et pensée naturée. La chair nomme une étoffe commune du voyant et du visible, naissant l'un à l'autre d'une déhiscence ou d'un éclatement qui est l'ouverture au monde. Méditant le contenu latent de la pensée cartésienne, Merleau-Ponty a toujours donné à cette ouverture le nom de cogito. Mais le passage d'une phénoménologie de la perception à une ontologie de la chaire transforme profondément la signification du cogito et les rapports entre sujet percevant, sujet parlant et sujet pensant. Ce livre, puisant dans les nombreux inédits de Merleau-Ponty, étudie comment cette transformation s'est accomplie à travrs la lecture critique de Husserl, Heidegger, Sartre, et surtout dans le dialogue constant avec l'auteur des Méditations, 'le plus profond des penseurs'.
L'auteur, ancien élève de l'ENS Ulm, est agrégé de philosophie et habilité à diriger des recherches. Il enseigne en Première supérieure à Toulouse.
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Ce livre est à l'heure actuelle et tout simplement le seul ouvrage d'ensemble sur la pensée de Heidegger. Si beaucoup tentent aujourd'hui, avec plus ou moins de bonheur, d'utiliser en sens unique l'incontournable lexique heideggerien et, même en s'en voulant les contradicteurs, présupposent ainsi en cette oeuvre puissante une unité fondamentale, la possibilité de cette unité demeure paradoxalement la paralysante zone d'ombre interdisant encore l'accès au plus grand monument de la pensée contemporaine. Tout se passe comme si la longévité de Heidegger avait suffi à le rendre classique. Face à une pensée qui est devenue, consciemment ou non, une constante référence pour chacun, il était donc urgent de donner enfin à un auteur classique une monographie classique le concernant.
Les études sur Heidegger sont fournies mais dispersées, épaisses mais éparses. Confronté à l'éclatement des recherches concernant une oeuvre elle-même tout à la fois monothématique et singulièrement éparse, cet ouvrage met en évidence et en oeuvre la cohérence qui maintient en un tout les multiples affluents du fleuve heideggerien.
Constamment tourné vers ce que l'histoire de la pensée a légué de plus essentiel, Heidegger ne cesse néanmoins d'appeler le lecteur à ce que cette immense tradition porte encore de décisif pour notre avenir. C'est pourquoi un ouvrage qui entend restituer la cohérence de cette pensée retrace par la même occasion la totalité du chemin emprunté par la philosophie depuis son commencement, et séjourne au coeur de chacune des étapes de cette somptueuse histoire. Des présocratiques à Platon, d'Aristote à Descartes, de Kant à Nietzsche et Husserl en passant par Fichte et Hegel, cette étude regarde s'organiser l'imperturbable méditation de Heidegger: d'abord dans sa confrontation avec les grandes époques de la pensée occidentale, puis dans sa teneur propre.
La parole heideggerienne est réputée difficile. Une monographie qui entend être lisible ne peut se contenter de paraphraser la langue de l'auteur qu'elle choisit. C'est la raison pour laquelle Maxence Caron choisit - comme pour conjurer Babel et en accord avec l'esprit qui anime les oeuvres de Heidegger - de laisser la parole poétique accompagner la pensée. On croisera ainsi sur le chemin de l'explication des figures telles que celles de Mallarmé ou de Rimbaud; on lira également Supervielle, Rilke, Hugo, saint Jean de la Croix, Michaux, Claudel, Novalis, Valéry, Saint John Perse, Péguy, Char, et bien entendu Hölderlin dont la pensée heideggerienne a peut-être voulu ne devenir que la conscience. En suivant le chemin de Heidegger, nous accédons à la dernière grande pensée de l'histoire et avançons pas à pas au côté de celui qui a éperdument voulu retrouver la «magnificence du Simple».
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