Féminismes islamiques

Féminismes islamiques
Ali Zahra
Ed. La Fabrique

Féminismes islamiques : un titre qui en fera sursauter beaucoup, y compris parmi celles et ceux qui se pensent à l'abri de tout préjugé. C'est que le stéréotype «islam = oppression de la femme» croise partout comme un sous-marin, tantôt en surface et pavillon haut, tantôt dans les profondeurs de l'inconscient.
Ce que montre ce livre, le plus souvent on ne le sait pas : que dans les pays où l'islam est la religion dominante, des croyantes puissent lutter pour l'égalité, retourner les textes sacrés contre le patriarcat, s'élever contre les autorités politiques et religieuses qui bafouent les droits des femmes.
De l'Égypte à l'Iran, du Maroc à la Syrie, en France, aux États-Unis et jusqu'en Malaisie, des intellectuelles, des chercheuses et des militantes sont engagées dans une démarche féministe à l'intérieur du monde religieux musulman. Zahra Ali nous fait entendre leurs voix et propose ainsi de décoloniser le féminisme hégémonique.

La domination policière. Une violence industrielle

La domination policière. Une violence industrielle
Rigouste Mathieu
Ed. La Fabrique

La violence policière n'a rien d'accidentel, elle est rationnellement produite et régulée par le dispositif étatique. La théorie et les pratiques de la police française sont profondément enracinées dans le système colonial : on verra dans ce livre qu'entre les brigades nord-africaines dans les bidonvilles de l'entre-deux-guerres et les brigades anti-criminalité (les BAC) dans les «cités» actuelles, une même mécanique se reproduit en se restructurant. Il s'agit toujours de maintenir l'ordre chez les colonisés de l'intérieur, de contenir les territoires du socio-apartheid. Le développement des armes «non létales» - Flash Ball, Taser... - propulse aussi une véritable industrie privée de la coercition. Rigouste montre comment l'expansion du marché international de la violence encadre la diffusion des doctrines de la contre-insurrection et permet de les appliquer à l'intérieur des métropoles impériales.
Cette enquête, fondée sur l'observation des techniques et des pratiques d'encadrement et de ségrégation depuis ceux qui les subissent et les combattent, montre comment est assurée la domination policière des indésirables, des misérables et des insoumis en France.

Le temps de la parole. Et autres écrits sur l'humanité et la religion

Le temps de la parole. Et autres écrits sur l'humanité et la religion
Ortigues Raymond
Ed. Presses universitaires de Rennes

« La charité est incompatible avec la foi. Il est impossible d'aimer sincèrement Dieu et de croire qu'il existe. « Qu'est-ce que j'aime quand j'aime mon Dieu ? », demandait saint Augustin. J'aime la vérité, la droiture, la justice, la bienveillance, le détachement de soi et le respect d'autrui..., toutes choses incompatibles avec « ce que les hommes appellent un dieu ». Il y a là un malentendu, un quiproquo. C'est pourquoi la charité chrétienne a engendré finalement une civilisation athée. » Edmond Ortigues n'a jamais cessé de réfléchir sur le rôle de la parole, sacrée ou profane, le paradoxe du désir d'absolu et le sens de la religion comme réalité historique et sociale.
On trouvera dans ce volume deux textes majeurs aujourd'hui inaccessibles au public, Le temps de la parole, réflexion sur le message évangélique et la parole de Dieu, et Le monothéisme, texte que l'auteur considérait comme une sorte de testament intellectuel. L'ensemble est complété par sept études dont une inédite sur la religion, le mysticisme et le délire, l'athéisme, l'islamisme et la laïcité, et permet de comprendre ce qui fait l'unité et la force d'une pensée qui, partie d'un catholicisme engagé et fervent, s'est orientée vers une conception anthropologique de la religion où la quête de l'absolu garde toujours son sens. Les analyses d'Edmond Ortigues sont toujours d'une acuité intellectuelle stimulante et le plus souvent d'une très grande actualité.

Diderot, un diable de ramage

Diderot, un diable de ramage
Starobinski Jean
Ed. Gallimard

« J'ai un diable de ramage saugrenu, moitié des gens du monde et des lettres, moitié de la halle. » C'est le Neveu de Rameau qui le dit à son interlocuteur, qui l'écoute et qui lui réplique.
Car Diderot est un écrivain qui tend l'oreille en tous lieux. À la ville, chez les imprimeurs, dans les salons, dans les villages, il a été constamment à l'affût des grandes rumeurs de son siècle.
C'est lui qui déclare : « Autant d'hommes, autant de cris divers. [...] Combien de ramages divers, combien de cris discordants dans la seule forêt qu'on appelle société. »
Les études rassemblées dans ce livre suivent le mouvement de ce grand écouteur, qui sut devenir un admirable parleur.
J. S.

Accuser et séduire. Essai sur Jean-Jacques Rousseau

Accuser et séduire. Essai sur Jean-Jacques Rousseau
Starobinski Jean
Ed. Gallimard

Rousseau procéda à la manière des prédicateurs. Il accusa le mal, pour mieux annoncer le remède. C'est « l'indignation de la vertu », assure-t-il, qui marqua le début de sa vocation « philosophique », lorsqu'un concours d'académie souleva la question des conséquences du « rétablissement des sciences et des arts », c'est-à-dire de la Renaissance. Son indignation, son ressentiment ont alors fait naître en lui une éloquence dont il ignorait encore tout le pouvoir.
Il a jugé nécessaire de remonter aux premiers temps de l'histoire humaine, et le modèle qu'il en a proposé lui a valu d'être considéré comme l'un des fondateurs de l'anthropologie. Il parvint à loger dans son roman La Nouvelle Héloïse tout à la fois un lieu où vivre et des voyages couvrant la terre entière. Certains de ses lecteurs furent séduits au point de vouloir tout quitter pour vivre à ses côtés, comme s'il avait fondé un ordre religieux. Ce singulier attrait s'exerce encore.

Du gouvernement des vivants. Cours au Collège de France, 1979-1980

Du gouvernement des vivants. Cours au Collège de France, 1979-1980
Foucault Michel
Ed. EHESS/Gallimard/Seuil

Du gouvernement des vivants est un cours charnière. Prononcé au Collège de France au premier trimestre 1980, Michel Foucault y poursuit cette histoire des «régimes de vérité» qui traverse l'ensemble des cours du Collège de France, en y apportant une inflexion majeure : commencée dans le champ du juridique et du judiciaire, l'exploration s'était poursuivie dans le champ politique - thématique des rapports pouvoir-savoir, puis de la gouvernementalité. Elle s'investit ici dans le champ des pratiques et des techniques de soi, domaine de l'éthique que Michel Foucault ne quittera plus.
«Comment se fait-il que dans la culture occidentale chrétienne, le gouvernement des hommes demande de la part de ceux qui sont dirigés, en plus des actes d'obéissance et de soumission, des 'actes de vérité' qui ont ceci de particulier que non seulement le sujet est requis de dire vrai, mais de dire vrai à propos de lui-même, de ses fautes, de ses désirs, de l'état de son âme ?», s'interroge Michel Foucault. Cette question le conduit d'une relecture d'OEdipe-roi de Sophocle à l'analyse des «actes de vérité» propres au christianisme primitif, à travers les pratiques du baptême, de la pénitence et de la direction de conscience. Michel Foucault choisit de s'intéresser aux actes par lesquels le croyant est appelé à manifester la vérité de ce qu'il est lui-même, en tant qu'être indéfiniment faillible. De l'expression publique de sa condition de pécheur, dans le rituel de la pénitence, à la verbalisation minutieuse de ses pensées les plus intimes, dans l'examen de conscience, c'est l'organisation d'une économie pastorale centrée sur l'aveu que l'on voit se dessiner.
Du gouvernement des vivants est la première des enquêtes, inédite, que Michel Foucault va mener dans le champ de l'éthique, autant dans les cours du Collège de France que dans les derniers volumes de l'Histoire de la sexualité.

La révolution moléculaire

La révolution moléculaire
Guattari Félix
Ed. Prairies ordinaires

En septembre 1977 sort, aux Éditions Recherches, une première Révolution moléculaire. Suivie, en avril 1980, d'une autre Révolution moléculaire, en version poche, chez 10/18. Un seul titre pour deux livres fort différents l'un de l'autre : recueils d'articles écrits par Félix Guattari entre 1972 et 1980, ces deux versions ne livrent pas les mêmes textes, et, lorsqu'elles le font, elles les modifient tant qu'ils en deviennent presque méconnaissables.
Si cette Révolution Moléculaire version 2012 se donne comme ambition de rendre à nouveau disponible l'ensemble des textes qui furent publiés chez ses deux aînées, si elle a le même titre, elle ne constitue pas pour autant une réédition. Car, en les agençant, elle se donne, nécessairement, comme autre et singulière.
Comme si, rétive à une seule et unique version, toute révolution moléculaire ne pouvait se donner qu'au pluriel : des révolutions moléculaires, des pratiques plutôt qu'une théorie ; une façon de faire de la politique qui, ainsi que nous le rappelle Félix Guattari, «aura quelque chose à voir avec une perspective révolutionnaire s'il est vrai que les bouleversements sociaux, à l'avenir, deviendront absolument inséparables d'une multitude de révolutions moléculaires au niveau de l'économie du désir.
Si cette Révolution Moléculaire version 2012 se donne comme ambition de rendre à nouveau disponible l'ensemble des textes qui furent publiés chez ses deux aînées, si elle a le même titre, elle ne constitue pas pour autant une réédition. Car, en les agençant, elle se donne, nécessairement, comme autre et singulière.
Comme si, rétive à une seule et unique version, toute révolution moléculaire ne pouvait se donner qu'au pluriel : des révolutions moléculaires, des pratiques plutôt qu'une théorie ; une façon de faire de la politique qui, ainsi que nous le rappelle Félix Guattari, «aura quelque chose à voir avec une perspective révolutionnaire s'il est vrai que les bouleversements sociaux, à l'avenir, deviendront absolument inséparables d'une multitude de révolutions moléculaires au niveau de l'économie du désir.

Autochtone imaginaire, étranger imaginé. Retours sur la xénophobie ambiante

Autochtone imaginaire, étranger imaginé. Retours sur la xénophobie ambiante
Brossat Alain
Ed. Souffle

« Cet essai, construit en étoile est composé de textes (…) qui, à défaut de s’enchaîner les uns aux autres, se répondent et communiquent par différents “passages”, selon la méthode mise en oeuvre par Walter Benjamin dans son Paris capitale du XIXe siècle. Il s’agit (…) de problématiser une question destinée à nous reconduire à notre objet, à son coeur – pourquoi la question de l‘étranger tend-t-elle à devenir, sous nos latitudes, l’obsession des pouvoirs contemporains ? Au travers de cette question, qui n’en est une pour nous qu’autant que les méfaits des sorcières en étaient une pour un certain XVIe siècle, n’est-ce pas plutôt la question du pouvoir et la question des discours qui se trouvent posées ? ». A.B.

En pierres denses et compactes, la langue d’Alain Brossat se révèle contondante, réparatrice à force de ne pas se plier à l’esprit du temps, d’y répondre sans formes prescriptives, sans marche à suivre. S’il figure quelques pistes pour des mouvements salvateurs, l’action principale consiste à re-tracer l’absurde d’une série d’énoncés en matière d’hospitalité et d’identité. En y intercalant des rappels historiques et en repeuplant les apories des discours en la matière, l’auteur nous donne la possibilité d’en faire autant : restaurer nos percepts et affects. En dix chapitres, Alain Brossat revient patiemment sur ce que nous entrapercevions en accéléré et de manière de plus en plus marquée : l’Europe forteresse déclinée en cinq chapitres philosophiques, deux textes de circonstance consacrés à Mohamed Merah et DSK, une célébration singulière de l’anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, deux tableaux politiques du cinéma et « Qui a tué Walter Benjamin ? » ou le récit du verrouillage de toutes les portes, mentales, physiques, politiques.

Que peut la philosophie ? Etre le plus nombreux possible à penser le plus possible

Que peut la philosophie ? Etre le plus nombreux possible à penser le plus possible
Charbonnier Sébastien
Ed. Seuil


Après plus d’un siècle d’enseignement obligatoire de la philosophie, où en sommes-nous de la formation de l’« esprit critique », jugé si précieux pour faire de chacun le citoyen d’une démocratie ?

Cette question n’est pas seulement pédagogique, elle concerne l’existence même de la philosophie : la circulation des idées est ce sans quoi la pensée n’existe pas ? sinon comme archive. Une idée reste lettre morte si elle n’est pas réactualisée par des individus vivants et curieux. Dès lors, à quoi bon se féliciter d’une richesse culturelle passée si n’est pas perpétuellement suscité un désir d’y puiser des idées qui seront pensées à nouveaux frais pour une situation donnée ?

La philosophie n’est pas une discipline érudite, abstraite et difficile comme ont voulu le croire et le faire croire certains professeurs. Elle est d’abord une pratique concrète et émancipatrice qu’il s’agit de partager et de faire ensemble. Ainsi, il faut penser ces conditions concrètes et effectives de la pensée philosophique (en classe notamment) pour comprendre comment l’espoir politique d’émancipation collective peut faire sens pour nous aujourd’hui.

On l’aurait presque oublié, mais l’Éducation nationale, jadis mieux nommée par Condorcet « Instruction publique », est en son principe un projet révolutionnaire. À travers la question singulière de la place de la philosophie en son sein, et en s’instruisant des erreurs passées et des illusions sur les fausses réussites, on perçoit tout ce qu’il y a encore à penser et à faire si l’on veut véritablement être le plus nombreux possible à penser le plus possible.

Sébastien Charbonnier est philosophe et professeur de philosophie. Il est l’auteur de Deleuze pédagogue (2009).

Anthologie, vol. 2. L'apogée de la théologie mystique de l'Eglise d'Occident

Anthologie, vol. 2. L'apogée de la théologie mystique de l'Eglise d'Occident
de Cues Nicolas
Ed. Cerf

Nicolas de Cues est un auteur encore peu connu du public français. Maurice de Gandillac a été le premier à le faire sortir de l'ombre en traduisant ses textes. Or le Cusain est un auteur majeur qui a assuré le passage du Moyen Âge à la Renaissance. C'est, en quelque sorte, le premier des humanistes, un théologien incontournable, un esprit universel qui s'intéresse aussi bien au droit qu'aux mathématiques, à l'astronomie, à la philosophie, ou à l'action sociale, comme en témoigne le célèbre hôpital qu'il a fait construire à Bernkastel-Kues pour accueillir les plus démunis. Même s'il opte pour la spéculation, il a le souci de rendre ses idées accessibles à tous, comme en témoigne le célèbre jeu de la boule, ou encore la référence à l'icône qu'il propose pour amener les fidèles à l'expérience de la vision de Dieu.

La présente anthologie, inédite en français, ne présente pas seulement l'ouvrage classique de Nicolas de Cues qu'est la Docte

Ignorance, mais offre un large choix de textes donnant une idée des différentes facettes de ce grand précurseur de la modernité.

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