Bye bye Babylon. Beyrouth 1975-1979

Bye bye Babylon. Beyrouth 1975-1979
Ziadé Lamia
Ed. Denoël Graphic

«En 1975, j'avais 7 ans et j'aimais les Bazookas que ma mère nous achetait, à Walid et à moi, chez Spinney's.» Tout commence au Paradis, dans ce mirage d'Occident, le Beyrouth des années 70. Les familles aisées emplissent leurs caddies des mêmes produits de rêve qu'à Paris et New York, tandis que les miliciens de tous bords bourrent les leurs de M16, d'Uzi et d'AK47. Lamia Ziadé est cette petite fille qui observe, subit, raconte l'avancée imparable d'un conflit qui va ravager la Babylone chatoyante qui l'a vue naître. Sous ses doigts, la guerre devient pop. Assemblage d'éclats joyeux et noirs, inventaire d'instants d'horreur et d'innocence, son roman graphique retrace l'histoire d'une ville, d'un peuple, d'un monde en proie à la folie destructrice. Un portrait lucide, grave et inédit, comme si les yeux de l'enfance avaient le pouvoir de voir plus loin que l'intelligence adulte.

   

 

L'oeil de l'histoire, vol. 2. Remontages du temps subi

L'oeil de l'histoire, vol. 2. Remontages du temps subi
Didi-Huberman Georges
Ed. Minuit

Quel est le rôle des images dans la lisibilité de l'histoire ? C'est la question reposée dans ce livre. Là où Images malgré tout tentait de donner à comprendre quelques images-témoignages produites depuis l'« oeil du cyclone » lui-même - le camp d'Auschwitz en pleine activité de destruction - cet essai traite, en quelque sorte, des images après coup et, donc, de la mémoire visuelle du désastre.

Une première étude s'attache à reconstituer les conditions de visibilité et de lisibilité - concurrentes ou concomitantes - au moment de l'ouverture des camps nazis. Elle se focalise sur les images filmées par Samuel Fuller en 1945 au camp de Falkenau et sur la tentative, une quarantaine d'années plus tard, pour en faire un montage doué de sens, une « brève leçon d'humanité ».

Une seconde étude retrace les différentes procédures par lesquelles le cinéaste et artiste allemand Harun Farocki revisite - et remonte - certains documents de la violence politique. On découvre alors ce que c'est, aujourd'hui, qu'une possible restitution de l'histoire dans le travail des images. Deux essais plus brefs évoquent successivement l'activité photographique d'Agustí Centelles au camp de Bram en 1939 (ou comment un prisonnier regarde les autres prisonniers) et le questionnement actuel de Christian Boltanski sur l'image en tant que reconnaissance, transmission et oeuvre de dignité.

Voir aussi, L'oeil de l'histoire, vol.1. Quand les images prennent position

Galeristes. Entretiens

Galeristes. Entretiens
Martin-Fugier Anne
Ed. Actes Sud

Anne Martin-Fugier est historienne, et aussi passionnée d'art contemporain. Ces deux domaines se rejoignent, recherche de la vérité et amour de la beauté. Depuis 1975, elle arpente les galeries pour le plaisir de la découverte. Petit à petit se nouent des amitiés avec des galeristes qui vont l'accompagner dans un voyage à la fois pictural et sentimental. A travers l'itinéraire de onze galeristes, elle nous montre des gens épris d'art, capables de déceler des talents, de soutenir les carrières des artistes et de répondre aux désirs des collectionneurs. Ainsi se dessine une cartographie d'un milieu plutôt taiseux, qui accepte d'entrouvrir les coulisses d'un métier étrange mêlant le goût du risque et de l'aventure artistique.

Essai sur le camion. D'après Camion rouge, peinture d'Alain Mathiot

Essai sur le camion. D'après Camion rouge, peinture d'Alain Mathiot
Ravey Yves
Ed. Maison chauffante
Rendu dans la cuisine du peintre, mon regard s'étant porté sur le Camion Rouge, peinture-collage sur carton, j'ai pensé à Maître Eckhart. Puis ce fut le tour de l'Âne Jaune : Un âne, un camion, un personnage, le corps à quatre centimètres de l'âne, la main touchant l'âne.
Mon attention s'est concentrée sur ces deux compositions. Et je note aujourd'hui que dans Camion Rouge, l'objet représenté ne compose avec rien.

Les éclats du miroir. Petits contes algériens

Les éclats du miroir. Petits contes algériens
Françoise Saur & Boualem Sansal
Ed. Trans photographic press
«Ils s’appellent Osmane, Zaïd, Hussein, Ishtar… On le voit dans leurs regards amis, dans leurs sourires innocents, leurs gestes mesurés, leur coquetterie d’enfant, leurs attitudes prudentes.
Ils connaissent déjà la misère et le dénuement, ils connaissent la violence et les privations, ils les ont subi des siècles durant, sans discontinuer ; ils n’ont plus rien à craindre. Comme ils connaissent la patience, le courage, la dignité, l’humilité ; ils n’ont plus rien à apprendre. Ils possèdent tout ce qui fait levain pour magnifier leur vérité, notre vérité.
[…]
Grâce soit rendue à cette femme venue d’ailleurs, elle nous a permis de nous rencontrer dans ce grand puzzle nommé Algérie. Et grâce soit rendue à Tendo Taijin et Nacer Khemir dont les chants ont accompagné notre quête»
 
Françoise Saur, première femme à avoir obtenu le prix Niépce, poursuit un travail documentaire original, à la marge de l’autobiographie. 
Alsacienne, mais née en Algérie, elle signe avec ce (beau) livre son travail le plus personnel.
Boualem Sansal qui accompagne cet ouvrage d’un long texte original, est chroniqueur dans la presse française (Le Monde notamment). Son dernier ouvrage « Le village de l’Allemand » Gallimard, 2009 a fait polémique en France et en Algérie cette année.

Comment dire la grâce en peinture. 52 maîtres de Giotto à Bacon

Comment dire la grâce en peinture. 52 maîtres de Giotto à Bacon
Vergnon Dominique
Ed. Michel de Maule

La peinture résulte du jeu entre beauté et vérité, séduction et intuition que les peintres, recréateurs de la réalité, imaginent et nous proposent à travers leur oeuvre, chacun à sa manière. À son tour, ce jeu conduit à ce point unique et fédérateur qu'on appelle la grâce. C'est elle qui lie le génie au sublime. C'est elle qui transcende le spectateur, lui donne émotion et plaisir.

Avec ses cinquante-deux portraits, de Giotto à Bacon, Dominique Vergnon nous fait entrer dans l'intimité de ces peintres et donne à voir comment ils disent cette grâce, la saisissent, l'éternisent et, en s'adressant à notre sensibilité, comment ils nous permettent son appropriation.

Les choix de l'auteur nous invitent à parcourir un itinéraire ouvert par son amitié pour chacun d'eux. Son texte, nourri à la source de leur existence, montre combien ces artistes, chacun dans un moment de l'histoire, demeurent des « maîtres de toujours ».

Pas à pas. Essai sur le cheminement quotidien en milieu urbain

Pas à pas. Essai sur le cheminement quotidien en milieu urbain
Augoyard Jean-François
Ed. A la croisée

Alors que la sémiologie de l'espace et la macrosociologie déterministe dominaient les études urbaines, apparut dans les années 1970 ce livre à la recherche d'une autre voie pour comprendre la vie quotidienne et les pratiques d'habiter. L'objet observé : la marche en milieu urbain telle que racontée par les habitants et dont le caractère transversal est exploité à plusieurs titres : elle relie naturellement toutes les pratiques quotidiennes que la sociologie sectorielle distingue ; elle articule les façons de marcher et les façons de parler dans un même style d'être ; elle configure l'espace par le corps et oriente la perception par le mouvement : elle mobilise l'insu et l'instinctif sous les représentations figées ; elle «déréalise» l'espace conçu par la dynamique de l'invention banale et de l'imaginaire. Pour finir, il s'agit, dit David Ames Curtis dans sa postface, «d'une élucidation exceptionnelle non seulement du fond imaginaire instable de l'expression habitante vécue [...], mais aussi des dessous souterrains de ce fond».

En ce sens, Pas à pas n'est pas qu'une étude sur les nouveaux grands ensembles apparus dans les années 1970, ni seulement une tentative post-structuraliste pour nommer et classer les figures cheminatoires d'une sorte de rhétorique intuitive. Dans Pas à pas, oeuvre traversante à la lettre, la marche devient un paradigme pour penser autrement l'espace urbain. Une lecture attentive révèle un spectre beaucoup plus vaste touchant à la rénovation des techniques d'enquête, à une nouvelle sociologie des appropriations, à la critique de la logique urbanistique. Réintroduisant le sensible et les prégnances de l'atmosphère dans l'étude des pratiques urbaines, Pas à pas anticipe déjà les travaux ultérieurs de son auteur. Loin des discours hâtifs ou généralisateurs, page après page, avec une précision concrète, l'oeuvre construit une véritable philosophie de l'expression ordinaire, une autre façon de fonder le sens de la vie quotidienne : dans l'immanence et la modalité. À «relire Pas à pas, le monde commence autrement» dit Yves Winkin dans sa préface.

Traduit en italien et en américain, mais épuisé depuis longtemps en France et souvent recherché comme ouvrage de référence, Pas à pas méritait une réédition attendue. En effet, des notions telles que façons d'habiter, manières de faire, expression habitante, modalités ordinaires, invention du quotidien, aujourd'hui très répandues dans les sciences sociales, y trouvent leur origine. Plus encore, le récent retour à l'échelle mondiale des études sur la marche quotidienne appelait la disponibilité de ce texte fondateur qu'on a trop souvent omis de citer. Dans son avant-propos, Françoise Choay affirme ainsi que «les questionnements et les constats énoncés par Augoyard sont non seulement prémonitoires, mais d'une pleine actualité. En vingt-cinq ans, Pas à pas a acquis une portée globale».

Répétitions. L'esthétique musicale de Terry Riley, Steve Reich et Philip Glass

Répétitions. L'esthétique musicale de Terry Riley, Steve Reich et Philip Glass
Collectif
Ed. Presses Sorbonne nouvelle

Qu'entendre dans les boucles infinies que déroule la musique «répétitive» de Terry Riley, Steve Reich et Philip Glass ? Quelles formes d'écoute leurs oeuvres sollicitent-elles ? Quel sens prend leur démarche dans le champ d'oppositions esthétiques des années 1960 ? Quel rapport au temps et à la mémoire se trouve induit par la sempiternelle itération du similaire ?

Dans le sillage de l'esthétique analytique, cet ouvrage s'intéresse à une forme musicale souvent mal comprise, dont les échos s'entendent pourtant dans les musiques contemporaines, non seulement savantes, mais aussi populaires : techno, house music, electronica en sont largement tributaires.

Peinture et regard. Ecrits sur l'art

Peinture et regard. Ecrits sur l'art
Arikha Avigdor
Ed. Hermann

Avigdor Arikha (1929-2010) était de toute évidence l'un des grands peintres de notre temps. Ami intime de Samuel Beckett et portraitiste, entre autres, de la Reine Elizabeth ou de Catherine Deneuve, il était aussi un historien d'art admiré par ses pairs.

Dans Peinture et regard, il examine l'oeuvre d'artistes éminents et porte sur l'univers des arts le double regard de l'historien et de l'artiste. En-dehors des grands noms comme Rubens et Vélasquez, Arikha traite aussi de peintres pour lesquels il ressent plus d'estime que d'affinité ; mais la raison ultime de ses écrits est, pour lui, de donner envie de regarder les oeuvres dont il parle et de contribuer ainsi à apprendre à voir.

D'une érudition exceptionnelle, Arikha s'est vu confier par plusieurs grandes institutions (Le Musée du Louvre, la Frick Collection de New York, le Museum of Fine Arts de Houston et tant d'autres) des présentations nouvelles, plus explicites, des oeuvres de Poussin ou d'Ingres.

 

 

Foucault va au cinéma

Foucault va au cinéma
Patrice Maniglier & Dork Zabunyan
Ed. Bayard

Des textes réunis pour la première fois

Voici réunis pour la première fois les textes de Michel Foucault sur le cinéma grâce à Dork Zabunyan et Patrice Maniglier qui les présentent et les analysent. On peut s'étonner que cette facette de l'œuvre de Michel Foucault n'est jamais fait l'objet d'un livre jusque là tant ses ouvrages sont commentés et débattus aujourd'hui. Une réflexion inédite sur sa relation au cinéma .

Penser autrement le cinéma

Ses travaux sur la prison, l'hôpital, la sexualité répondaient à son désir de « penser autrement » et notamment de faire de l'histoire autrement, en s'attachant à tous ces micro-procédures dont nous ne sommes pas conscients mais qui décident certains des changements les plus profonds. Justement, et c'est ce que démontrent ici les philosophes Dork Zabunyan et Patrice Maniglier, le cinéma est un lieu où ces micro-changements inconscients peuvent être vus. La relation de la pensée de Foucault au cinéma est donc loin d'être marginale, comme l'apport de cet ouvrage à la réception de son œuvre.

 

Newsletter