Dans une ville en proie à la guerre civile, un jeune homme, Khalil, veut faire le pan de l'innocence et récuse la nécessité, pour survivre, de prendre parti. Réfugié dans sa petite chambre, il donne libre cours à une étrange frénésie ménagère et médite sur la décomposition du monde alentour. Inexorable, le « dehors » débusque cependant Khalil de sa retraite...
En évoquant, à travers l'initiation de son héros, l'étrange logique que ces guerres aux invisibles champs d'honneur installent au coeur de toute existence, Hoda Barakat met en scène les mécanismes de la folie très particulière qui s'organise quand « tuer » et « vivre » deviennent synonymes. Bien loin de toute une littérature nostalgique du Beyrouth d'antan, La Pierre du rire mène une enquête exigeante sur l'alchimie qui, au coeur du plus grand trouble, permet quelquefois au réel de reprendre corps.
Franck Chopin n'est pas de ces hommes qui ont eu très tôt un but dans la vie. Nulle vocation chez cet individu sinon celle de vétérinaire, vers dix ans, lorsqu'il aimait tellement soigner les petits mammifères, puis à vingt ans celle de chef de la révolution mondiale (Marx, Engels, Lénine, Chopin) - ensuite plus rien. Ensuite il va faire des études de sciences, qui le ramèneront à s'occuper des animaux - mais son objet d'étude est devenu l'insecte, la mouche plus précisément, qui est un genre qu'on ne soigne pas.
Et quatre ou cinq fois dans sa vie, il a disparu deux mois ; comme il connaît peu de personnes, on ne s'est pas trop inquiété.
Echenoz aime les lieux. Il a un talent fou pour suggérer, décrire une résidence anonyme, un lac artificiel, une gare parisienne, toute la poésie de Paris dans les vitres d'un RER. Il est de cette génération journalistique et voyageuse qui ne croit plus au roman, comme Balzac y croyait : naïvement. Jacques-Pierre Amette, Le Point
Le narrateur de Lac ne se contente pas de multiplier les rebondissements sans se prendre au sérieux. Des morceaux de réalité sont saisis dans les mailles et les miroitements de ses descriptions pour rire. La banlieue, par exemple, est présente avec une intensité qui renseignera les historiens du futur sur l'urbanisme parisien des années 80. Elle le fera mieux que les photographies, parce que les odeurs rôdent autour des fouillis de formes, les destins s'y faufilent, et les moeurs s'y impriment, comme sur les murs en démolition où restent accrochés des lambeaux de papiers peints usés à la tête des lits, des porte-savons suspendus, et autres vestiges de gestes quotidiens fossilisés.
Lac porte également témoignage sur la façon décousue de parler et de se taire, à la même époque - la nôtre. Les producteurs de cinéma seraient bien avisés de repérer l'aigu des répliques. Bertrand Poirot-Delpech, Le Monde
«Femme couronnée de paille naturelle, il faut renoncer au bleu de la tendresse, au rouge du désir, au jaune de la joie, et même au mauve de la fatigue. Sur les quais, les tonneaux, lentement, perdent leur parfum feutré de géranium. Terre insensible, heure vide, Babylone, après les cris, les morsures, c'est grand silence. Une digue continue dans la mer ce sol charnel, ce grand corps de continent que l'insolation divinise.
Une femme, une ville luttent d'indifférence.»
Sous les rayons du soleil couchant, la plaine du Henan est rouge, rouge comme le sang. Ce sang que vendent les habitants du Village des Ding pour connaître une vie meilleure. Mais, quelques années plus tard, atteints de « la fièvre », ils se flétrissent et quittent ce monde, emportés par le vent d'automne comme des feuilles mortes. Seul le fils du vieux Ding, qui a bâti sa fortune sur la collecte du sang, continue de s'enrichir en vendant des cercueils et en organisant des « mariages dans l'au-delà » pour unir ceux que la mort a séparés.
Le Rêve du Village des Ding est un roman bouleversant. Bouleversant par la tragédie qu'il raconte, bouleversant parce qu'il n'est que la fiction d'une réalité plus terrible encore. C'est l'histoire de centaines de milliers de paysans du Henan contaminés par le sida que l'auteur évoque dans ce roman d'une émotion poignante, traversé de rêves et de prémonitions. « Colère et passion sont l'âme de mon travail », dit Yan Lianke. Son livre est interdit en Chine et l'auteur privé de parole.
Un texte lyrique et désespéré... de la très belle littérature (Nils C. Ahl, Le Monde).
Lorsqu'un chauffard un jour le renverse, Devlin ne souffle mot de l'accident. Et quand une femme tombe sous une balle perdue lors d'une fusillade de rue, il se surprend à kidnapper le bébé de la victime. Pourquoi ? Lui-même l'ignore.
Devlin est psychologue pour enfants et pratique le taekwondo. Pour échapper à son malaise existentiel, il se lance dans un projet aussi exaltant que désespéré : ouvrir un cours de taekwondo dans l'un des quartiers noirs les plus défavorisés de Baltimore. Les membres de deux gangs rivaux s'inscrivent bientôt - de jeunes vendeurs de crack à la gâchette facile, animés d'une violence aveugle que Devlin croit un moment être à lui seul capable d'éradiquer, grâce à la maîtrise de soi qu'enseignent les arts martiaux...
Placé sous le double signe de la lucidité et de l'empathie, Dix Indiens confronte, au fil d'un fatal décompte, le monde blanc que corrode la dépression individuelle et le monde noir en proie au désarroi collectif.
« En un éclir lady Slane sentit que le puzzle éclaté de ses souvenirs venait de se reconstituer [...]. Elle se retrouva sur la terrasse de la villa indienne désertée [...]. Elle appuyait ses bras sur le parapet brûlant, faisant pivoter lentement son ombrelle.
En fait, elle se tenait ainsi pour dissimuler son trouble car elle venait de se retrouver à l'écart de tous avec ce jeune homme à ses côtés. »
Le jour même de la mort de son mari Henry Holland, comte de Slane, lady Slane décide de vivre enfin sa vie.
Elle a quatre-vingt-huit ans. Lady Slane surprend alors son entourage en se retirant à Hampstead. Dans sa nouvelle demeure, toute passion abolie par l'âge et le choix du détachement, lady Slane se sent libre enfin de se souvenir et de rêver...
Léonard et Virginia Woolf disaient de ce livre de 1931 qu'il était le meilleur de Vita Sackville-West. Élégance folle, finesse et charme rétro. Epok.
Alvina, une jeune fille de bonne famille désargentée, découvre l'amour entre les bras d'un Italien, beau mais un peu fruste. Au mépris de toutes les conventions, elle le suit dans son pays. Perdue pour la morale, perdue dans un monde primitif dont elle n'a pas les clés, Alvina se découvre elle-même.
Peinture au vitriol de la société de province, fresque historique de l'Angleterre et de l'Italie au seuil de la Première Guerre mondiale, hymne à l'amour charnel et à l'instinct vital : trois motifs qui s'entremêlent ici dans un récit vigoureux, d'une fraîcheur déconcertante.
Par l'auteur de L'Amant de Lady Chatterley.
À chacun son dieu. Nick Tosches, écrivain aussi déjanté qu'érudit, a choisi le sien : Arnold Rothstein, le « roi des Juifs », un célèbre gangster des années 1920. De sa naissance en Bessarabie à son arrivée dans le Lower East Side, Tosches retrace avec une méticulosité sidérante la vie de ce truand légendaire, métaphore d'un New York cosmopolite et violent, où il faut parfois tuer pour survivre.
Radioscopie d'une époque révolue, pamphlet, saga, élégie de l'american dream, réalité ou pur mensonge... Entre la fiction et le documentaire, Nick Tosches se livre en virtuose à un tour de prestidigitation éblouissant.
Nick Tosches donne à la vie et à la mort d'Arnold Rothstein la dimension d'un récit biblique. Il dresse un formidable portrait de ce fils d'émigrants devenu roi des bas quartiers de Manhattan.
Marianne.
À lire Tosches, on a l'impression de suivre un évangéliste fou, rêvant de planter sa croix sur une colline de bookmakers et de filles perdues. Le Point.
Dans sa maison de la Grande Plaine, Mme Szöcs attend : son mari est en train de mourir, il ne reconnaît plus sa femme et sa dernière phrase est destinée à Iza, leur fille trop aimée.
Une fois son père enterré, la jeune femme emmène la vieille dame vivre avec elle dans son appartement de Budapest. Elle a tout décidé, fait le tri entre meubles et objets à garder et à abandonner, arrangé la chambre, sans rien demander à sa mère, ni son avis ni ses envies.
Peu à peu, la fragile petite vieille se pétrifie dans la non-existence qui lui est ainsi offerte, jusqu'au jour où elle décide de retourner dans son village...
Après le succès de La Porte, Prix Femina 2003, La Ballade d'Iza est une poignante réflexion sur la difficulté d'aimer, de comprendre l'autre et sur la solitude intrinsèque des êtres. » Claire Julliard, Le Nouvel Observateur
«Le 6 juin 1944, après trois ans d'abstinence, il avait absorbé un alcool. Aujourd'hui, après une nouvelle période d'abstinence, il se remettait à boire. Un peu. Pas beaucoup.» : Sigbjörn Wilderness retourne au Mexique en compagnie de sa nouvelle femme. Ce voyage ravive le souvenir douloureux de son premier mariage. Rongé par les affres de l'écriture et de l'alcool, il va s'éloigner peu à peu de celle qu'il aime...