Aux rives du désert et des montagnes enneigées d'Asie centrale, à Urumqi, un jeune garçon découvre la vie. Près de son immeuble, il y a le cimetière où dansent les feux follets, le ciel d'un bleu infini comme il n'en existe nulle part ailleurs, et ce vieil orme de l'école où il grimpe pour regarder le monde sans être vu. Car le jeune Liu Aï aime beaucoup écouter aux portes et épier les gens. Que ce soit la belle Hajitaï à la peau si claire et aux cheveux incroyablement blonds. Ou les secrets et manoeuvres des adultes, qui en ces années de Révolution culturelle forment un réseau de mystères aussi attirants que redoutables. Et lorsque arrive un jour un élégant Shanghaïen, avec son gros dictionnaire d'anglais sous le bras, pour enseigner la langue d'Oxford, il devient le symbole de toutes les attentes et des rêves les plus merveilleux de l'adolescence. Ce gentleman va ouvrir Liu Aï à un monde inconnu, fait de parfum, de culture et de libre pensée.
English est un roman plein de fraîcheur, de mélancolie, débordant de l'énergie de l'enfance et de la nostalgie lucide de l'écrivain qui la regarde. Il raconte un temps où « le bonheur était rouge du sang versé » mais aussi vibrant d'élans et d'espoirs qui n'avaient pas encore été trompés. Car à toute personne, il faut un rêve. C'est comme une maison, elle a besoin de fenêtres.
Dans ce roman d'une beauté poignante, Shin Kyung-sook met au jour un passé resté douloureusement enfoui dans sa mémoire. C'est l'été, elle a seize ans et quitte sa campagne pour Séoul. Le seul moyen pour elle d'accéder au lycée est de devenir ouvrière dans une usine et d'être choisie parmi les plus méritantes pour suivre des cours du soir. De seize à dix-neuf ans, elle va connaître les privations, le travail éreintant, la solitude pareille à une pluie froide, puisant chaque jour en elle-même une force renouvelée pour vivre jusqu'au lendemain. Et c'est là, dans cette étroite chambre parmi les trente-sept de la maison labyrinthique qui abrite les employés d'usine, que va jaillir en elle le désir, la promesse incroyable de devenir écrivain. Pour conserver quelque chose de pur au fond de moi.
Pour Shin Kyung-sook, devenue écrivain comme elle s'en était fait la promesse, il était temps de revenir à la source. Ce passé qu'elle a fui à dix-neuf ans sans se retourner, elle doit remonter vers lui. Elle le doit à tous ceux dont elle a partagé les souffrances, ceux qui n 'avaient pas de nom, qui étaient privés de richesses matérielles, condamnés à bouger sans arrêt leurs dix doigts pour produire... Je dois leur donner une place digne en ce monde au moyen des mots.
Pietro Paladini est immobile. Dans l'oeil du cyclone. Il ne sort plus de sa voiture, garée au bas de l'école de sa fille, à Milan. Ce quadragénaire séduisant que la vie avait épargné vient de perdre sa femme, Lara. Il attend de souffrir, mais ce n'est pas si facile de ressentir la perte. Les amis et les anonymes viennent lui parler, l'étreindre, partager ce temps suspendu, ce ' chaos calme ' où il se réfugie désormais. Les collègues de travail à la veille d'une fusion financière sans précédent, un frère fumeur d'opium, une belle-soeur qui se dénude en pleine crise de nerfs, tous à un moment laissent tomber leurs masques. Tous renoncent à la comédie sociale. Sur cette situation digne de Beckett, Sandro Veronesi construit un roman émouvant, ample, magistralement tissé : le mélange de l'intime dans ce qu'il a de plus vibrant et du réel dans ce qu'il a de plus dérangeant.
JFK vient d'être abattu. La guerre du Vietnam bat son plein. Jeune agent de la CIA engagé dans des opérations contre le Viêt-cong, Skip Sands ne tarde pas à perdre foi en son métier. Croisant les parcours d'une demi-douzaine de personnages pris dans la guerre, Denis Johnson décrit de manière bouleversante leur chute inévitable. Roman polyphonique sur fond d'histoire et d'espionnage, aussi luxuriant que la jungle asiatique, cette oeuvre folle, d'une puissance rare et déployée sur près de deux décennies, n'est pas sans évoquer le cinéma de Michael Cimino ou de Francis Ford Coppola. Une déflagration au napalm, dramatique et hallucinatoire.
Drôle de temps pour être juif. Drôle de temps pour être flic. Ça tombe mal pour Meyer Landsman ! À Sitka en Alaska, devenu la patrie glaciale et désolée des Juifs, il est l'inspecteur le plus décoré de la police yiddish. Chargé de faire régner la paix dans cette communauté encline aux mystères, l'homme a pourtant sombré dans l'alcool, ruinant son mariage au passage. Exilé à l'hôtel, il découvre un matin le corps d'un junkie assassiné dans le hall. Mais pourquoi ces pressions pour abandonner l'enquête ? Landsman s'obstine : ce mort lui plaît et il refuse de laisser son assassinat impuni... Dans ce monde où religieux et criminels ont échangé leurs compétences, jamais la Terre promise ne lui aura paru plus lointaine...
1914. L'Empire britannique est à son zénith et Londres s'apprête à subir les foudres du Kaiser. Thommy Thomson oeuvre dans l'ombre pour un plumitif mégalomane quand un avocat lui propose un marché insolite : écrire l'histoire de son client, Marcus Garvey, un gitan accusé d'avoir assassiné au Congo les fils du duc qu'il servait.
Publié avant le procès, le récit concourt par son immense succès à sauver de la potence celui que tout accuse. Il met au jour le détail de l'expédition enragée de deux aristocrates qui s'enfoncent dans la jungle congolaise jusqu'aux confins du monde, aiguillonnés par la fièvre de l'or. Avec Marcus, ils vont mener la première guerre verticale de l'histoire contre une armée insolite surgie des entrailles de la terre. Par convoitise pour une de ces créatures, les hommes ouvrent la boîte de Pandore et les intenses tropiques débrident ceux qui ne savent plus tenir leur rang. Les sang-bleu se révèlent de fieffées canailles et un pauvre domestique s'érige en sauveur de l'humanité.
Dans cette aventure qui semblait établir le triomphe de la justice des hommes, tout n'est que chimère ; seule la fiction y gagne des lettres de noblesse.
Cette correspondance crépusculaire couvre les dix dernières années de la vie de Stefan Zweig, durant lesquelles il écrit des livres importants, où l'Histoire joue un rôle majeur : les biographies de Marie-Antoinette et de Marie Stuart, Souvenirs d'un Européen, Le Joueur d'échecs, mais aussi Le Monde d'hier, qui constitue en quelque sorte le pendant de cette correspondance : l'écrivain y exprime son désarroi d'héritier des Lumières nostalgique d'un XIXe siècle dont il ne reste presque rien.
Peu à peu, la mélancolie et la souffrance font place à un état dépressif chronique. Zweig s'engage contre le nazisme.
Résolument humaniste mais méfiant envers toute forme d'engagement politique, il ne parvient plus à trouver dans son existence - lui qui fut le chroniqueur de l'âge d'or de l'Europe - ce qui pourrait lui faire supporter le dégoût, la lassitude et la déception.
«Il est des lieux où le simple fait de naître est une faute, où le premier souffle et la dernière quinte de toux ont la même valeur, la valeur de la faute.»
Maria, une jeune fille de dix-sept ans, voit son fiancé forcé de fuir le pays pour trouver la mort en Afghanistan...
Deux hommes, qui ont refusé de faire le jeu de la Camorra, se font assassiner à la place d'un autre, avec une violence aveugle... Les deux récits réunis dans ce livre nous plongent dans l'intimité d'un pays «en guerre» où, pour échapper à la misère, les hommes sont condamnés à s'engager dans l'armée ou la Camorra. Avec autant de pudeur que de force, l'auteur de Camorra nous révèle la férocité de notre monde et nous fait voir l'insaisissable.
Une plantation aride de Louisiane, théâtre de tous les déchirements. C'est là que se nouent les amours du contremaître cajun Bonbon et de Louise, une esclave noire. Et celles, plus coupables encore, du farouche Marcus, tout juste sorti de prison, et de Louise, la femme blanche du contremaître. Sous le regard réprobateur de toute une communauté, tabous et non-dits volent en éclats. Mais comme dans une tragédie antique, leurs destins prendront peu à peu valeur d'exemple.
« Le lecteur se laisse prendre à ce roman superbe au point de retrouver, dans cet univers clos et si spécifique, les cruelles lois qui régissent partout les différences de races et de classes. » Sud Ouest dimanche
« Les romans de Gaines ont une portée miraculeusement universelle. Comme toute oeuvre majeure. » Lire
Alai est né et a grandi dans cette région du Tibet frontalière avec la Chine, dont les paysages éblouissants servent de cadre à l'épopée d'un puissant clan tibétain dans la première moitié du XXe siècle. Elle est racontée par le fils cadet de son chef, considéré comme un «idiot», dont le regard décalé révèle les secrets, intrigues, amours et haines cachés derrière les luttes de pouvoir. Quand le chef de clan accepte de faire pousser des graines de pavots fournies par les nationalistes chinois, il sème aussi les graines de la fin d'un monde.
Un roman tibétain nourri de rêves, de violence, de magie et de drame.