Nous sommes séparés et opposés. Nos luttes aboutissent à des conceptions irréconciliables quant à l'être même des choses. Dans cet ouvrage, Tristan Garcia refuse de se résoudre à l'affrontement et propose d'accorder une existence commune, minimale et égale à toutes les entités possibles, afin de mieux reconstituer leurs différences et leurs puissances. Il répond à la destitution de l'universel, critiqué de toutes parts, par la recherche d'un « commun distinct », un être commun à toutes choses, un minimum de détermination qui ne serait pas l'expression d'un pouvoir, sans sombrer pour autant dans l'inconsistance.
Le défi de la sécurité globale
Comment lutter contre la mondialisation actuelle et ses dérives ? Quelles sont les logiques qui ont précipité la crise majeure, à la fois économique, sociale et environnementale, que nous vivons aujourd'hui ?
Au croisement de l'économie et de la géopolitique, l'ouvrage s'efforce de mettre en évidence les conditions et les enjeux de l'édification d'un modèle capable de relever le pressant défi de la sécurité globale, en analysant d'abord les contradictions d'un système économique, financier et international qui, depuis les années 1980, n'a cessé d'étendre sa domination.
Nous serions ainsi passés clans une société de contrôle. Un nouveau monde dominé par des technologies nouvelles permettant d'inventer des manières de gouverner et d'être gouverné inédites. Ces changements radicaux impliqueraient un renouvellement total de nos catégories de pensée qui resteraient construites sur des concepts dépassés. La question politique ne serait plus celle de la loi, ni celle de la norme, mais celle de la régulation en temps réel des comportements dans une grande boucle cybernétique de rétroaction. Dit comme cela, la notion de contrôle provenant des philosophies de Deleuze et de Foucault a l'apparence d'un « mythe » politique qu'il serait urgent de déconstruire. Nous proposons ici autre chose. Ne pas céder à la séduction du « plus jamais comme avant », pas non plus à la facilité du « rien de nouveau sous le soleil », mais proposer de mettre le concept de contrôle au travail, au service d'une « analytique critique de la politique ».
Cette histoire intellectuelle du radicalisme noir revient sur les origines européennes du marxisme avant de s'attarder sur le développement de l'histoire africaine et les débuts de l'esclavage transatlantique. Enfin, la pensée de trois figures majeures de la tradition radicale noire, W.E.B. Du Bois, C.L.R. James et le romancier Richard Wright, est étudiée.
Traiter de la Terre, c'est avoir à l'esprit une chaîne symbiotique : celle du vivant, dans ses innombrables déploiements. Les humains, les espèces animales et végétales, les microbes, bactéries et virus, les corps inorganiques et les substances minérales ainsi que les dispositifs technologiques et autres appareillages artificiels font inséparablement partie de cette chaîne du vivant. Mais c'est aussi le cas, du moins dans les pensées animistes africaines, de toutes les forces invisibles, des génies, des esprits et des masques.
Prenant fermement appui sur l'insondable richesse de ces pensées, Achille Mbembe propose dans cet essai une réflexion stimulante sur la Terre, ses devenirs, et surtout la sorte de communauté qu'elle forme avec la cohorte des espèces animées et inanimées qui l'habitent, y ont trouvé refuge ou y séjournent.
Depuis le milieu du XXe siècle, l'identité a envahi les sciences humaines et sociales - du discours public et journalistique, elle est devenue un mot de passe de notre époque dont l'extension toujours accrue dissimule mal le vague, et parfois l'absence complète de signification.
La guerre, pour reprendre l'expression du général Le Borgne, serait « morte à Hiroshima » il y a plus d'un demi-siècle. Et pourtant elle n'a jamais cessé. Actes terroristes, conflits israélo-palestiniens et moyen-orientaux, implosions de la Yougoslavie, pays déchirés par les factions, sans même parler des autres guerres : économiques, psychologiques, informatiques, guerres des sexes ou des générations... L'invasion de l'Ukraine par la Russie a pourtant rebattu les cartes. Cette fois, dit-on, c'est le retour de la vraie guerre, avec ses exactions, ses horreurs, sa violence. Mais qu'est-ce qu'une vraie guerre ?
Lorsque je lis, une voix en moi m'intime de lire (« lis ! »), tandis qu'une autre s'exécute, prêtant sa voix à celle du texte, comme le faisaient les antiques esclaves lecteurs que l'on rencontre notamment chez Platon. Lire, c'est habiter cette scène qui, même lorsqu'elle est intériorisée dans une lecture apparemment silencieuse, reste plurielle : elle est le lieu de rapports de pouvoir, de domination, d'obéissance, bref, de toute une micropolitique de la distribution des voix.
L'écoute attentive de la polyphonie vocale inhérente à la lecture conduit vers ses zones sombres : là où, par exemple chez Sade ou dans des jurisprudences récentes, elle peut devenir un exercice violent, punitif. Mais en prêtant ainsi l'oreille aux rapports conflictuels des voix lisant en nous, on est aussi conduit à revisiter l'idée, si galvaudée depuis les Lumières, selon laquelle lire libère. Les zones sombres de la lecture sont ses zones grises : là où lectrices et lecteurs, en faisant l'épreuve des pouvoirs qui s'affrontent dans leur for intérieur, s'inventent, deviennent autres. Aujourd'hui plus que jamais, à l'ère de l'hypertexte, lire, c'est faire l'expérience des puissances et des vitesses qui nous traversent et trament notre devenir.
Nous sommes séparés et opposés. Nos luttes aboutissent à des conceptions irréconciliables quant à l'être même des choses. Dans cet ouvrage, Tristan Garcia refuse de se résoudre à l'affrontement et propose d'accorder une existence commune, minimale et égale à toutes les entités possibles, afin de mieux reconstituer leurs différences et leurs puissances. Il répond à la destitution de l'universel, critiqué de toutes parts, par la recherche d'un « commun distinct », un être commun à toutes choses, un minimum de détermination qui ne serait pas l'expression d'un pouvoir, sans sombrer pour autant dans l'inconsistance.
Nos expériences ordinaires suffisent-elles à donner un sens à nos vies ? N'y a-t-il pas au contraire des expériences exceptionnelles, rares, supérieures, qui rompent avec l'ordinaire et nous font toucher quelque chose de plus profond, de plus réel, d'absolu ? Les philosophes de l'expérience radicale soutiennent en effet qu'il existe une différence de nature entre deux grands types d'expériences : d'un côté, les expériences pratiques, habituelles, empiriques, qui nous maintiennent dans un régime d'apparences ; de l'autre, des expériences privilégiées, telles que l'extase mystique, l'effusion érotique ou l'exaltation de la fête, transformant l'individu qui les traverse, le transportant dans un espace et un temps propres, imposant de nouvelles valeurs et dévoilant le fond des choses par- delà les apparences.