Après une longue absence, le narrateur rentre à Palerme, sa ville natale, pour y passer trois jours de vacances chez ses parents. Par une opération de « carottage », le but de ce séjour est de mesurer les transformations de la ville et, à travers elle, de l'Italie tout entière. Pendant ces soixante-douze heures il va donc observer, écouter et enregistrer, sur la plage, dans la rue et dans les cafés, telle une sonde qui collecte d'innombrables informations avant de les analyser. Mais ce qui s'annonçait comme un simple jeu et non une recherche sérieuse le conduit assez vite à un constat : Berlusconi. Partout et toujours, à Palerme comme dans toute l'Italie, sur toutes les bouches et tous les écrans, dans les esprits et toutes les situations, toujours et seulement Berlusconi. D'où la question que notre homme est contraint de se poser : Berlusconi a-t-il créé l'Italie ou n'est-ce pas plutôt l'Italie qui, au fil des années, a créé Berlusconi ?
Errance dans une ville lunaire et crépusculaire, Dépaysement est un journal intime palermitain qui analyse avec une grande finesse l'ère Berlusconi : brillant, hilarant et salutaire.
Un beau jour, Tomas sort de chez lui et, poussé par une envie soudaine, décide de poursuivre son chemin. Laissant derrière lui sa femme et sa maison, il renoue avec l'art du vagabondage et se délecte de son effet salutaire sur la pensée. Dans ce récit contemplatif et ciselé, le lecteur est invité à accompagner ce flâneur infatigable à travers la Norvège. Sans obligations ni feuille de route imposée, celui-ci se laisse guider par l'envie et le rythme de ses pas : sa promenade improvisée le conduit au pays de Galles, à Paris, à Istanbul avant de l'entraîner vers les montagnes de la Transylvanie. Au fil de son escapade physique et mentale, le narrateur itinérant invoque de nombreux écrivains qui ont eu recours à la marche comme à un instrument philosophique : Voltaire, Rousseau, Hölderlin, Kierkegaard, Walt Whitman, D. H. Lawrence, Wittgenstein, Sartre, Heidegger, Thomas Bernhard, Bruce Chatwin...
Roman dénué d'artifice, quête des plaisirs simples - marcher, voir, sentir, penser, être, raconter... -, Marcher est un véritable hymne à la lenteur qui consacre Tomas Espedal comme une des voix incontournables de la scène littéraire norvégienne contemporaine.
En 1895, Strindberg s'installe à Paris. Il délaisse la littérature au profit des sciences : naturelles d'abord, occultes ensuite. C'est le début d'une période marquée par une violente crise mystique, jusqu'au renouveau littéraire avec un texte autobiographique : Inferno.
Le retour de Strindberg en Suède, à partir de 1899, annonce une décennie aussi mouvementée et productive que les précédentes. La veine théâtrale est toujours féconde. En 1907, l'écrivain atteint enfin une certaine aisance matérielle et réalise le rêve de sa vie : avoir son propre théâtre - le Théâtre Intime. Il crée alors ses Pièces de chambre : la Maison brûlée, l'Orage, le Pélican, la Sonate des spectres, l'Ile des morts, ensemble de textes qui disputera la célébrité à son théâtre naturaliste des années 1880.
Il meurt à Stockholm le 14 mai 1912, laissant derrière lui une oeuvre immense.
Son roman la Chambre rouge vaut à August Strindberg (1849-1912) la célébrité à trente ans. Il publie pamphlets, nouvelles, pièces de théâtre, peint, se marie trois fois, sillonne l'Europe. Jusqu'à la fin de sa vie, il reste au coeur des débats politiques et littéraires. En près de dix mille lettres et plus d'un demi-siècle, sa correspondance révèle une passionnante entreprise d'investigation intellectuelle et sensible.
« Un monument de colère et d'excès évoquant irrésistiblement ces deux autres imprécateurs que sont Léon Bloy et Céline. »
Christophe Mercier
Le Figaro littéraire
Situé dans les environs de Newark, à l'époque où éclate une terrible épidémie de polio, Némésis décrit avec précision l'impact des circonstances sur nos vies.
Pendant l'été 1944, Bucky Cantor, un jeune homme de vingt-trois ans, vigoureux, doté d'un grand sens du devoir, anime et dirige un terrain de jeu. Lanceur de javelot, haltérophile, il a honte de ne pas avoir pris part à la guerre aux côtés de ses contemporains en raison de sa mauvaise vue. Tandis que la maladie provoque des ravages parmi les enfants qui jouent sur le terrain, Roth nous fait sentir chaque parcelle d'émotion que peut susciter une telle calamité : peur, panique, colère, perplexité, souffrance et peine.
Des rues de Newark au camp de vacances rudimentaire, haut dans les Poconos, Némésis dépeint avec tendresse le sort réservé aux enfants, le glissement de Cantor dans la tragédie personnelle et les effets terribles que produit une épidémie de polio sur la vie d'une communauté de Newark, étroitement organisée autour de la famille.
< Il y a comme un abîme au coeur des Heures anglaises. Cet abîme tient au fait que Henry James se soit voulu, ou plutôt ait eu l'air de se vouloir, anglais, et que, malgré son installation à Londres dès 1876, et en dépit même desa naturalisation, obtenue en pleine guerre, le 28 juillet 1915, sept mois jour pour jour avant sa mort, il ne l'ait jamais vraiment été ; ou du moins n'a-t-il jamais été considéré comme tel par ceux dont il se voulait, ou avait l'air de se vouloir, compatriote. [...] L'Angleterre est le berceau de la langue anglaise, et sa capitale, dans les années victoriennes, se trouve être le rassemblement humain le plus nombreux, le plus dense et le plus divers du globe. Par conséquent : 'Pour un homme de lettres qui s'efforce de pratiquer même modestement, l'instrument de Shakespeare et de Milton, de Hawthorne et d'Emerson, qui chérit l'idée de ce qui en est sorti et qui peut même encore en sortir, Londres doit toujours avoir une grande valeur illustrative et évocatrice, et en fait une sorte de saineté.'>
Un écrivain anglais se lance à la poursuite d'un meurtrier. La victime? Le cinéma. Le lieu du crime? Los Angeles. Afin d'élucider cette troublante affaire, il marche. Ce piéton acharné, un certain monsieur Self, va avoir du mal à mener sa mission à bien. Le cinéma n'est plus, certes, mais Hollywood respire encore et domine toujours les esprit.
Salman Rushdie, Bret Easton Ellis et James Bond font une apparition dans ces contes de la folie peu ordinaire aui revisitent l'imaginaire collectif, du film noir à la théorie du complot.
Obsédés par le nanisme, en proie à des hallucinations ou souffrant d'Alzheimer, Self et ses doubles de fiction auscultent la maladie mentale sous toutes ses formes. Avec un humour qui ne s'interdit pas les bouffées délirantes, Self traque les symptômes d'une modernité au bord du précipice, où l'identité et la mémoire disparaissent, dissoutes dans les clichés, les images, tous ces reflets qui pourraient un jour remplacer la réalité.
Elle ne sait plus. Ou plutôt, la drogue aidant, elle ne se rappelle que trop bien : le bébé rose assassiné, les bandages autour de la tête, non ce n'était pas une poupée qu'elle a vue, c'est sa petite soeur, et c'est son père qu'elle aimait tant qui l'a tuée , étouffée, elle le sait, à moins que ce soit sa mère... Trente ans après, elle doit la venger, il le faut.
Et il en va ainsi pour les personnages de ces dix nouvelles glaçantes. Hommes et femmes, jeunes et vieux, ils ne peuvent plus respirer. Dans l'attente désespérée d'un bonheur qu'ils ont connu et perdu, ou tant rêvé et jamais approché, ils étouffent, ils ont besoin d'air et de vengeance. Ils veulent qu'on leur rende ce que, selon eux, on leur a pris : un coeur, une épouse, un enfant, une jeunesse, une vie... Et les victimes de ces prédateurs, perdant la respiration à leur tour sous les assauts de l'angoisse ou de la haine, n'ont plus qu'à tenter de ne pas sombrer dans les remugles d'un passé qu'elles croyaient à tort oublié.
Quand Zoe Kruller, jolie serveuse se rêvant star de country, est découverte brutalement assassinée dans son lit, la police de Sparta vise aussitôt deux suspects : Delray, le mari dont Zoe est séparée, et Eddy Diehl, l'amant de longue date. Mais, sans preuve, l'enquête piétine. Les rumeurs s'amplifient, ravageant au passage l'existence des deux hommes et imprimant un cours étrange à celle de leurs enfants.
Aaron Kruller et Krista Diehl, adolescents sacrifiés à l'histoire familiale, chacun persuadé que le père de l'autre est l'assassin, conçoivent peu à peu une redoutable obsession réciproque. Etrange lien que l'éloignement et les années n'entameront en rien. Aussi, lorsque longtemps après le drame ils se rencontrent de nouveau, ils semblent prêts à exorciser les fantômes du passé, à se réconcillier avec leur lourd héritage. Mais rien n'est simple pour ces êtres qui oscillent entre violence muette, désir sauvage, et peur de l'autre.
Avec Petit oiseau du ciel, Joyce Carol Oates fait le récit d'une passion romantique et cruelle, sensuelle et destructrice. Dans cet univers brutal, où l'alcool et la drogue font oublier le quotidien, où la dureté est le meilleur des remparts, tous rêvent d'une nouvelle vie, mais est-ce seulement possible? Une histoire captivante, disséquée comme toujours de manière implacable.
Mêlant souvenirs et imagination débordante, ces deux nouvelles que relient l'attachement de Mo Yan à l'enfance, à sa province natale et au monde animal, décrivent une Chine rurale où la débrouillardise permet d'affronter la dure réalité.
Mo Yan lui-même s'y dévoile comme jamais ; en adolescent turbulant et bavard aux prises avec la souffrance du veau, la misère, et la ruse infinie des hommes, ou en observateur de dix ans, candide et curieux, de la course de fond organisée par l'école. A chaque tour de piste, c'est la surprise, le suspense grandit tandis que l'enfant dresse un tableau truculent de la vie de son canton dans les années soixante.
Mo Yan laisse exploser avec délices la malice et l'énergie de l'enfance, la bonhommie, le courage et l'humour vache du monde paysan soumis aux lois absurdes de l'époque maoïste.
Arpenteur insatiable de Londres, Iain Sinclair dresse dans ce recueil de textes un portrait de sa ville, loin des images fabriquées pour touristes consommateurs.
La ville qu'il décrit est aux mains de spéculateurs qui construisent le site des Jeux Olympiques de 2012, ou plutôt s'enrichissent en orchestrant la destruction de quartiers entiers dont la population abandonnée est refoulée vers l'extérieur.
Au-delà de la M25, le gigantesque périphérique de la mégalopole londonienne, s'étend une terra incognita, zone d'anarchie et de piraterie colonisée par les résidences de prestige. Là aussi, un monde disparaît.
Au gré de ses dérives volontaires, à la manière d'un Walter Benjamin ou d'un Georges Perec, Iain Sinclair dresse une anthropologie de l'infra-ordinaire et déchiffre les signes de son époque.