La Contrée Immobile est une histoire qui se reflète sur le Lac de Verre. Pierre Hunter glisse, le lac cède et Pierre traverse le miroir.
La Contrée Immobile n'est pas un roman noir.
La Contrée Immobile un roman bleu givré, recouvert de la même pellicule scintillante que Fargo.
La Contrée Immobile est un thriller à déflagration lente, qui tend vers le fatalisme ou l'existentiel.On y devine l'écho des premiers courts romans de Paul Auster (La Cité de verre ; Les Revenants). Mais version Midwest.
Dans La Contrée Immobile, la mort s'appelle Tim Geer.
Dans La Contrée Immobile, l'amour s'appelle Stella.
La Contrée Immobile est gothique. Mais façon Midwest.
'Voici à peu près comment je me représente la démence en cette phase moyenne où mon père se trouve en ce moment : c'est comme si l'on vous arrachait au sommeil, on ne sait pas où l'on est, les choses tournent autour de vous, les pays, les êtres, les années. On s'efforce de s'orienter mais l'on n'y parvient pas. Les choses continuent de tourner, morts, vivants, souvenirs, hallucinations semblables à des songes, lambeaux de phrases qui ne vous disent rien - et cet état ne cesse plus du reste de la journée.'
Arno Geiger part à la rencontre de son père, en essayant de jeter un pont vers cet état de démence dans lequel ce dernier est plongé depuis des années.
Le récit de ce chemin parcouru ensemble est d'une sobriété et d'une poésie bouleversante. Car le romancier autrichien parvient non seulement à nous parler de l'homme que son père était avant - un très jeune soldat précipité sur le front de l'Est à la toute fin de la guerre, un mari insensible aux envies de changement de sa jeune épouse, un employé de mairie sans fantaisie et un père de famille autoritaire - mais aussi de ce quotidien que toute la famille doit réinventer autour de l'absence.
La mémoire s'effrite, les repères se brouillent, et August Geiger est parti en exil. Son fils va essayer de le retrouver, de le comprendre, même si la raison ne peut plus lui servir de guide. Au bout du compte, il réinvente son père, et par la grâce d'une écriture oscillant avec beaucoup de justesse entre gravité et humour, son récit reconstitue au plus près ce lien que la maladie d'Alzheimer et autres démences arrachent aux familles.
Le vieux roi en son exil est un de ces livres trop rares qui marquent le lecteur à jamais
Le musée de l'Innocence, créé par Orhan Pamuk à Istanbul, est un projet culturel singulier, mûri pendant des décennies par son créateur, qui a cherché à y saisir la ville de sa jeunesse par les objets du quotidien : l'éphémère, le bric-à-brac, le désordre qui caractérisent la vie de chacun. Ces objets particuliers sont intimement liés au Musée de l'Innocence, le roman de l'amour perdu de Pamuk, qui prête sa structure narrative à leur présentation. Des vitrines ou des boîtes magnifiquement conçues, contenant des séries d'objets soigneusement disposés, entraînent le visiteur au fil du récit, dans un voyage à travers le temps et l'espace autant que dans l'esprit du collectionneur, identifié à Pamuk comme à son narrateur amoureux.
L'auteur traite ici des sujets qui lui importent profondément : la psychologie du collectionneur, le rôle du musée, les photos du vieil Istanbul (que sa superbe collection personnelle vient illustrer), et bien sûr les coutumes et les traditions de sa ville.
A Los Yesares, dans la province de Valence, Sunta, cinquante ans, va se marier. Elle a décidé, avant de changer de vie, de consigner dans un cahier d'écolier les souvenirs de son existence dans ce village où 'seules restent vivre la paresse et les années'.
Au gré de la plume malhabile et touchante de Sunta, on découvre le quotidien des habitants du village au long d'une période douloureuse qui plonge ses racines dans le franquisme triomphant d'après la guerre civile espagnole.
Que les événements soient vus à travers le regard innocent de l'enfant ou la nostalgie de l'adulte qu'est devenue Sunta, ce qui importe c'est de redonner vie, par la magie du souvenir et de l'écriture, aux êtres qui ont participé à une histoire à la fois personnelle et collective, et puis en ont inexorablement disparu.
Dans un futur lointain, après que les feux nucléaires ont ravagé le monde – le Grand Boum –, ce qui reste des hommes est revenu à l’âge de fer, leur survie sans cesse mise en péril par des chiens mangeurs d’homme et des clans rivaux. La gnorance, la preuh et les superstitions ont pris le pouvoir. La langue n’est désormais plus qu’un patois menaçant et vif dans lequel subsistent par fragments les connaissances du passé. C’est là qu’Enig Marcheur, douze ans, va prendre la décision inédite de coucher par écrit ses aventures hors normes à la poursuite de la Vrérité en revenant sur les pas des hommes à l’origine du Sale Temps.
Road movie « monty pynchonesque », Enig Marcheur de Russell Hoban est avant tout une œuvre profondément humaine qui s’interroge tout à la fois sur la survie, les croyances, la politique, la manipulation et l’espoir. Raconté avec les mots d’un enfant dans la seule langue qu’il connaît, ce livre propose un voyage intimiste d’une rare intensité dans des contrées menaçantes.
Publié pour la première fois en 1980, qualifié de chef d’œuvre, de livre culte et de classique, ce roman post-apocalyptique, défi de traduction à la croisée des univers de Vonnegut, Pynchon, Self et McCarthy, est pour la première fois proposé en parlénigm.
Par une brumeuse nuit de février, l'éditeur Karl Petersén arrive, non sans quelques inquiétudes, dans le port d'Helsinborg, avec une bouteille de champagne et le contrat du poète Jan Y. Nilsson, qui vit à bord d'un bateau de pêche. L'éditeur l'a persuadé d'écrire un roman policier, futur best-seller, déjà vendu aux plus prestigieuses maisons d'édition d'Europe. Mais le poète acceptera-t-il de le signer ? Se résignera-t-il à sacrifier sa réputation et à se plier aux lois du marché ?
Lorsque Petersén découvre Jan Y. pendu, la réponse semble évidente. Le commissaire Barck, chargé de l'enquête, n'a aucun doute : les poètes ne se font pas assassiner, ils se suicident. Pourtant, les mobiles ne manquent pas...
A l'âge d'or du roman policier nordique, Björn Larsson signe ce qu'il appelle un 'genre de roman policier', jeu littéraire raffiné et ironique sur l'essence même de l'écriture poétique et romanesque. Dans une pétillante satire du monde éditorial continuellement à la recherche du prochain succès, seul un policier-poète a l'expérience et la sensibilité pour saisir les vérités cachées derrière les apparences...
Un écrivain italien, ancien cinéaste, fait la connaissance à New York du Count Cagliani, un étrange vieillard d'origine belge, spécialiste en parapsychologie, qui le persuade de se rendre à Saorge, dans le sud de la France, où il trouvera une émeraude aux pouvoirs extraordinaires. Il accepte d'autant plus volontiers qu'il espère y retrouver une femme longtemps aimée, et perdue de vue, Mariolina.
A Saorge, il s'installe dans un vieil hôtel... Et laisse la place à un fantomatique alter ego, le peintre Andrea Tellarini, que l'on suit dans un monde bouleversé, méconnaissable, régi par la violence et où réapparaît la magique émeraude.
Tellarini se lance alors dans une périlleuse équipée pour retrouver à son tour Mariolina. Jusqu'à ce que, par un nouveau coup du sort, les choses se remettent en place. Ou presque.
Rédigé par Soldati dans les dernières années de son existence, ce récit aux allures de fable fut unanimement salué comme un chef-d'oeuvre, par Pier Paolo Pasolini en particulier, dont on pourra lire l'essai en introduction de ce volume.
1926, PARIS LA NUIT. Hohl a 20 ans et arpente la ville en compagie d’autres artistes en exil, tout aussi fauchés, le long d'un axe place de Clichy-La Villette ou Montmartre- Montparnasse. Gares, bordels, brasseries, dancings de troisième zone, abattoirs, banlieues et hôtels meublés où caresser ses illusions de gloire sont les points de repère de cette société de l'ombre qui passe son temps à boire, marcher et débusquer des coins inexplorés. Mais rapidement le désir de montagne devient pour Hohl une obsession : il se prépare aux pages qu'il écrira & l'été 1926 et qui seront le point de départ de son chef-d'oeuvre, Ascension.
Paris 1926 est le journal, à la forme assez libre, d’artistes en formation : chaque membre du groupe informel et cosmopolite (peintre, sculpteur, architecte, poète) apporte l'oeil et la sensibilité liés à son art, faisant profiter l'ensemble des secrets de tel immeuble, tel canal ou tel paysage. C'est aussi une ébouriffante galerie de portraits acérés et cruels, tant pour les amis de Hohl que pour les touristes en goguette ou les types de la vie parisienne.
« Onze heures du matin. Le soleil au travail dans le ciel. Les hommes se fatiguent, dit Julie. Peut-être devriez-vous leur accorder une pause. Thomas donna le signal de la pause en agitant le bras de haut en bas. Les hommes se laissèrent choir sur le bas-côté de la route. Le câble se détendit sur la chaussée. Cette grandiose expédition, dit le Père Mort, cette valse sur un parquet inconnu, cette petite troupe de frères… Vous n’êtes pas un frère, lui rappela Julie. Attention de ne pas vous laisser emporter par la valse. Penser qu’ils m’aiment tant, dit le Père Mort, m’aiment au point de haler, haler, haler, haler sans trêve, tout au long des longues journées et des longues nuits et par des conditions météorologiques bien loin d’être optimales… »
D'un bout à l'autre du livre, on assiste au transport du cadavre du père, un père gigantesque, mort qui plus est, mais qui parle encore et vit par morceaux, donnant des ordres à son entourage furieux...
Le Père Mort constitue la tentative la plus élaborée de Barthelme pour mêler des genres littéraires réputés incompatibles : le conte rejoint l'épopée, la psychanalyse se lit comme une « féerie » de l'écriture... La littérature est bien l'art du « transport ».