Le Martín Fierro
Un essai de Jorge Luis Borges
traduit par Bernard Lesfargues,
suivi de Quatre vies imaginaires : El original es infiel a la traducción
Bernard Hoepffner
Une histoire littéraire
Brigid Brophy
Un souffle pluvieux et les origines de Penkhull
Colin Richmond
L'invention de Borges
Al Mokthar Al Maghrebj
Peut-être est-ce quelque chose dans son regard ou son pas souple de danseuse, peut-être sa fierté ou même sa prière expresse, qui amena Herman Cohen, porte-parole du groupe, à faire sortir du rang Katarzyna Horowitz.
Auschwitz, 1943 : la jeune femme échappe ainsi à la chambre à gaz et se joint à une vingtaine d'hommes d'affaires juifs américains qui ont su monnayer leur libération avec les nazis... sauf que le pacte se révèle être un piège et une course absurde vers la liberté, qui pousse Katarzyna Horowitz à commettre l'impensable.
La Danseuse de Varsovie, c'est le portrait fascinant d'une jeune femme qui, face à l'inacceptable, fait l'ultime choix de la dignité humaine.
Le mois passé, nous vantions la livraison du Believer américain de septembre. Quelle joie de voir déjà en français un des meilleurs articles du magazine US : il faut lire Hispaniola de Adam Thirlwell de toute urgence... et si vous êtes enclin aux folies bibliophiles, l'article de Bill Cotter vaut son détour de loufoqueries encyclopédistes...
Plus émouvant bien sûr, l'entretien avec David Foster Wallace, et aussi la conversation de Jonathan Lethem avec Paul Auster (qu'on peut lire aussi dans l'excellent recueil The Believer book of writers talking to writers)
Des vitamines pour l'hiver !
Tropismes
Au fil de ces 266 lettres, c'est toute la vie de Robert Walser, de ses débuts presque enchantés jusqu'aux sombres années de silence littéraire, qui prend un relief nouveau. Écrites à Zurich, Berlin, Bienne, Berne et Herisau, adressées à ses soeurs, à ses éditeurs, mais aussi à deux femmes, Frieda Mermet, qui fut sa muse et sa confidente, et la toute jeune Therese Breitbach, elles sont des pièces essentielles de son atelier d'écriture ; habitées de tendresse et de colères, d'intransigeance, d'indépendance, d'humour, d'ironie, d'un constant goût de vivre, elles donnent un coup de projecteur sur la carrière et l'étonnant combat quotidien de l'un des écrivains les plus brillants et les plus mystérieux de la littérature moderne.
De Franz Zeise, né en 1896, on ne sait rien, ou presque, sinon qu'interprète et traducteur, passionné par l'Espagne, il vécut un temps à Berlin et qu'on l'aurait encore aperçu en 1954, mais perdu déjà dans les ténèbres d'une demi-démence... Aussi bien ce roman de la folie de Don Juan d'Autriche, bâtard de Charles Quint, semblable comme dit Sciascia «au souvenir d'un rêve : très fort, lourd d'inquiétude et de prémonition», est-il un prodigieux chef-d'oeuvre, qui n'est pas sans faire songer à tel récit d'Artaud. Hier encore inconnu, aujourd'hui révélé, demain : enfin célèbre, voici un roman comme vous n'en avez jamais lu de semblable.
Le jeune Heinrich aurait dû devenir tailleur au village comme son père, ou charbonnier et paysan comme son grand-père. Mais « il ne vivait que dans les livres et jugeait à chaque instant qu'on ne lui laissait pas suffisamment de répit pour lire, aussi aspirait-il par-dessus tout à devenir un jour maître d'école. À ses yeux, c'était la position la plus estimable à laquelle il pourrait jamais s'élever ».
Or, dans les campagnes reculées de Westphalie, en ce XVIIIe siècle, les places sont rares, et les avanies nombreuses pour qui ne possède ni solides protections ni réel soutien familial. Heinrich en fera l'expérience douloureuse et, ne sachant opposer à ses épreuves que la foi et le « langage du coeur », il passera de surcroît pour un « parfait petit nigaud ». Mais ne nous y trompons pas : sous les dehors d'une peinture réaliste et (pré)romantique d'un monde aujourd'hui disparu, une sourde tension travaille en secret Les Années de jeunesse de Heinrich Stilling. Car si, dans cet épisode de l'« histoire vraie » de sa vie, Jung-Stilling (1740-1817) revendique sa sujétion aux décrets de la Providence, qu'il faudrait seulement décrypter pour y trouver son destin tout tracé, d'un même mouvement, c'est la vertigineuse question de l'autonomie : que faire de mon existence ? qu'il fait ici enfler de page en page.
Ces lettres sont bien la preuve qu'il n'existe pas de biographie définitive.
Au matin du 23 février 1942, près de Rio de Janeiro, on retrouve les corps enlacés de Stefan et Lotte Zweig, suicidés. Fuyant le nazisme, ils avaient quitté l'Autriche pour s'exiler en Angleterre dès 1933. Puis, en 1941, l'auteur d'Amok est invité en Amérique, où il est reçu en héraut de l'humanisme et de la paix. Les Zweig-vont parcourir tout le continent nord et sud-américain, de New York au Brésil, terre d'asile rêvée, d'où ils envoient à leurs amis et surtout à leur famille restée en Europe de nombreuses lettres, demeurées pour la plupart inédites jusqu'à aujourd'hui. On y entend l'espoir inlassable qui les animera jusqu'au bout - jusque dans leur dernière demeure de Petrópolis où, rattrapés par les fantômes de l'Europe en proie à la barbarie, ils mettront fin à leurs jours. Cette correspondance à deux voix est un document littéraire exceptionnel à plus d'un titre : pour la première fois, nous lisons pour ainsi dire les derniers mots de Stefan Zweig, et nous découvrons les « lettres d'une inconnue », celles de Lotte, une femme extraordinaire aussi courageuse que discrète, qui joua dans la vie de Zweig un rôle qu'on ne soupçonnait pas. Ce « voyage dans le passé », témoignage poignant de l'amour qui unira le couple jusque dans la mort, révèle sous un jour méconnu et passionnant l'un des plus grands écrivains du XXe siècle.
« La correspondance de Stefan et Lotte Zweig est en quelque sorte le reflet de l'état d'esprit de nombreux Juifs allemands ou autrichiens qui, rejetés par leur pays d'origine, n'ont pas su s'adapter à une nouvelle patrie ou se nourrir de leurs origines juives. »
Judith Laikin Elkin, Association des études juives sud-américaines
« Un livre prenant et émouvant, de la première à la dernière page. »
Klemens Renoldner, directeur de l'Institut Stefan Zweig de Salzbourg
« Ces lettres, à la fois intimes et familiales, hantées par la guerre, apportent un éclairage nouveau sur les années que le couple passa en Amérique du Sud ainsi que sur l'acte ultime et tragique qui fut le leur. »
Eva Hoffman
Cet ouvrage reprend l'intégralité des traductions de Franz Kafka par Jean Carrive (1905-1963). Seule est écartée sa traduction de La muraille de Chine qui fut reprise par Gallimard.
À l'origine, ses traductions ne sont parues qu'en revues, L'Arbalète, Les Cahiers du Sud, etc. pendant la dernière guerre. Il s'agit essentiellement des « pièces courtes » de Kafka. Ses traductions étaient pour Jean Carrive un acte de Résistance à l'hitlérisme. Cohérent, il cessera ce travail à la Libération.
Après avoir publié un dossier complet sur Franz Kafka et Jean Carrive, nous rendons ici disponible en un volume l'ensemble de ce travail de traducteur qui permet de relire, avec un nouveau regard, l'oeuvre de ce géant de la littérature du vingtième siècle.
Quatre garçons, une fille : d'un côté, le narrateur, le Saint, Luca et Bobby, et, de l'autre, Andre. Elle est riche, belle, et elle distribue généreusement ses faveurs ; ses parents, eux, sont des parvenus qui ne croient qu'au travail et à l'argent. Quant aux garçons, ils ont dix-huit ans comme elle, mais c'est là leur seul point commun. Car ils sont avant tout catholiques, fervents voire intégristes. Musiciens, ils forment un groupe qui anime les services à l'église, et ils passent une partie de leur temps à rendre visite aux personnes âgées de l'hospice, les « larves ».
Alors qu'elle incarne la luxure, Andre les fascine, ils en sont tous les quatre amoureux. La tentation est forte, mais le prix à payer sera lui aussi considérable.
Roman intime et habité par une authentique douleur, Emmaüs est un texte à part dans l'oeuvre d'Alessandro Baricco, sans doute le plus personnel à ce jour.
Le poète polonais Zbigniew Herbert (1924-1998) avait réuni en 1993 dans Nature morte avec bride et mors ses essais sur la Hollande. Avec Un barbare dans le jardin (1962), consacré à la France et à l'Italie, et Le Labyrinthe au bord de la mer (2000), à l'Antiquité grecque et latine, c'est le second des trois livres, désormais publiés au Bruit du temps, qu'il ramena de ses voyages en Europe de l'Ouest.
«Je compris d'emblée, si difficile que ce soit à expliquer rationnellement, qu'il m'arrivait quelque chose de grave, d'essentiel, bien plus qu'une rencontre fortuite au milieu d'une foule de chefs-d'oeuvre. Comment définir cet état d'esprit ? Brusque éveil d'une curiosité aiguisée, l'attention tendue, les sens mis en état d'alerte, l'espoir d'une aventure, consentement à l'éblouissement. J'éprouvai une sensation presque physique, comme si quelqu'un m'appelait, me faisait signe. Le tableau - précis, insistant - s'ancra dans ma mémoire pour de longues années.»
Zbigniew Herbert, «Nature morte avec bride et mors».