Devoirs d'école

Devoirs d'école
Arjouni Jakob
Ed. Christian Bourgois

Pressé de partir en week-end dans les environs de Berlin, Joachim Linde, professeur d'allemand et pur produit de l'après-68, réussit à grand peine à mettre fin à un cours dont le sujet, « Les écrivains allemands d'après-guerre et leurs prises de position sur le Troisième Reich », a déclenché de violentes polémiques parmi les élèves. De retour chez lui, tout dérape : la mère d'une de ses étudiantes l'appelle pour critiquer son cours et le menacer ; le petit ami de sa fille arrive à l'improviste de Milan et l'accuse de s'être comportée de manière déplacée avec elle pendant des années ; son fils, Pablo, mis au courant de la situation, lui casse la figure puis s'enfuit, ivre au mort, au volant de sa voiture. Le voyage à Berlin se trouve une nouvelle fois annulé, mais le pire reste à venir...
A travers ces personnages pétris de bonne conscience, dont l'apparente banalité dissimule un brin de perversité, c'est un certain visage de l'Allemagne d'aujourd'hui qui est remis en question.
Présentation de l'éditeur

La vie aigre

La vie aigre
Bianciardi Luciano
Ed. Actes Sud

Issu d'une enquête sur les conditions de travail des ouvriers toscans dans les années soixante, ce cauchemar orwellien fait la satire d'une Italie alors encore sous l'influence de l'endoctrinement fasciste, et d'intellectuels déchirés entre une politique gauchiste stérile et un néoréalisme esthétisant. Le livre-culte qui, devançant l'engagement de toute une génération, annonçait la vision révolutionnaire qui devait alimenter, à partir de 1968, les combats des groupes extrémistes.

Quand paraît ce roman, en 1962, l'Italie est en train de sortir d'une situation difficile qu'expliquent des vicissitudes politiques fort anciennes auxquelles sont venues s'ajouter plus de deux décennies de fascisme, une véritable guerre civile durant la Seconde Guerre et, à partir des années qui suivirent, la confiscation du pouvoir d'Etat par une classe sociale unique. Sans oublier en toile de fond la toute-puissance, sur les consciences, de l'Eglise catholique...
En 1962, le mot d'ordre « produire » commence à manifester ses effets et c'est dans cette atmosphère que Bianciardi écrit ce livre dont la prise de position littéraire devance l'engagement de toute une génération et annonce la vision révolutionnaire qui va alimenter, à partir de 1968, les combats des groupes extrémistes.
En bonne part autobiographique, La Vie aigre correspond, pour reprendre les termes même de son auteur dans l'ouvrage, au souhait de relater ?une histoire banale et médiocre?. Dès lors, le récit se constitue comme une sorte de journal de vie mettant en ?uvre un engagement militant dans le contexte collectif d'une mine, tout en évoquant la question de la survie personnelle au quotidien, l'objectif du narrateur ? un intellectuel marginal qui a prit à c?ur les conditions de travail dans les mines ? se voulant bel et bien politique, à l'instar de ce que seront plus tard les interventions des Brigades rouges.
Le livre a en effet pour objectif de venger la mort de plusieurs dizaines de mineurs à la suite d'un coup de grisou provoqué par la gestion économique féroce de la direction d'une mine : le narrateur projette de détourner l'air chargé de grisou pour faire exploser la « grande tour » où siège la direction de la mine, objectif d'emblée peu réaliste, et de moins en moins réalisable, et qui reste toujours présent en arrière-plan d'un récit également nourri des tensions de la vie personnelle du protagoniste, écartelé entre deux femmes, Mara dont il a un fils et Anna, la bella ragazza rencontrée lors d'une manifestation contre la politique des Etats-Unis.
D'abord journaliste, le narrateur en est venu à se consacrer à la traduction et la matière même des romans et des essais sur lesquels il travaille envahit sa conscience de façon de plus en plus obsédante, au même titre que la hantise des fins de mois et de la maladie, ce marasme ne s'éclaircissant, çà et là, que grâce aux discussions entre les protagonistes où s'esquissent les thèmes qui seront ceux de la gauche extra-parlementaire d'après 1968 : la dénonciation des hypocrisies politiques et économiques, de la société de consommation, de l'aliénation des individus, de la civilisation de l'automobile, de la sélection, des conditions de travail des plus marginaux ; sans oublier la formulation de la revendication de l'assassinat politique.

Si, dans la sobriété de son écriture, La Vie aigre aura probablement autant compté, lors de sa parution, pour la lucidité et l'humanité de son néo-réalisme que pour ses composantes annonciatrices, on peut imaginer que ce texte-culte (qui n'est pas sans rapport avec le propos du film de Marco Tullio Giordana, Nos meilleures années) peut, bien au-delà des « anciens combattants » de la lutte des classes, croiser de nos jours le public qu'ont pu avoir jadis L'Etabli de Robert Linhart ou, plus récemment, un Olivier Rolin avec sa fresque sur la fin des années 1960, Tigre en papier (2002). Débuts dans la vie professionnelle, tâtonnements dans la vie affective, questionnements sur l'engagement politique : autant de thèmes, en effet, de nature à parler aux jeunes et moins jeunes condamnés à la précarité que l'on sait...
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Mûriers sauvages

Mûriers sauvages
Hemaidan Younes Imane
Ed. Verticales

« Les mûriers que j'avais plantés dans le temps ont dû tomber à l'état sauvage, un arbre qu'on ne soigne pas, ça devient sauvage, forcément. »

Mûriers sauvages est le livre initiatique de Sara, enfant druze élevée sous le joug d'un père-tyran, dans une magnanerie de la montagne libanaise. Tandis que les ouvrières dévident les cocons de soie, Sara remonte le fil de ses origines. Elle n'a de cesse de reconstituer l'image de sa mère, « la maudite », une femme trop libre, qui a quitté la propriété lorsque Sara avait trois ans.
Mûriers sauvages est le roman d'une double métamorphose : celle d'une jeune femme qui finit par accepter son passé, celle d'une civilisation crépusculaire dont les derniers liens traditionnels vont lâcher. C'est la chronique délicate d'un être en devenir et d'une famille où se joue le petit théâtre de la grande Histoire. Au moyen d'une langue volontiers intime et mélancolique mais toujours à vif, Imane Humaydane-Younes, conteuse des vies suspendues, tisse sous nos yeux la trame d'un Orient au féminin.
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Parklife

Parklife
Shuichi Yoshida
Ed. Picquier

Ce petit roman est une bouffée d'air pur dans la vie affairée et raisonnable des citoyens du XXIe siècle que nous sommes. Un air venu du parc de Hibiya à Tôkyô, où l'on pénètre sur les pas d'un jeune employé légèrement excentrique, et soudain « l'exhalaison de terre et d'herbe vous chatouille les narines ». Là, il croise une triathlonienne consommatrice de bains moussants, rencontre un vieil homme qui fait voler un capricieux aérostat rouge, rêve, médite, s'exerce à chambouler la perspective pour voir le monde autrement. Il arrive que s'y nouent des idylles, à peine plus tangibles que le bruissement des pigeons qui s'envolent. Ce récit a le charme des parenthèses qui s'ouvrent parfois dans la vie pour laisser entrer l'enchantement, comme un léger vertige de déraison. La ville n'est pas loin, les buildings cernent l'horizon, mais dans cet espace clos et protégé, se jouent les menues aventures qui donnent son goût unique à l'existence, la petite musique d'un grand parc au c?ur d'une immense capitale.
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Les amants de ma mère

Les amants de ma mère
Hope Christopher
Ed. Panama

Autrefois, il semblait à Kathleen Healey que l'Afrique lui appartenait tout entière. Aviatrice, chasseuse de gros gibier et passionnée de tricot, elle volait selon son envie, atterrissait là où elle l'avait décidé. Dispensant librement ses faveurs à de multiples amants, elle traversait l'histoire de son pays, l'Afrique du Sud, dans une indifférence impériale. Alexander, son fils unique, a grandi à l'ombre de ce tourbillon. Il ne se reconnaît pas dans cette mère absente et encore moins dans les maîtres blancs qui règnent à coups de lois raciales, de mépris et de brutalité. Il choisit l'exil mais reviendra à Johannesburg à l'appel de sa mère mourante, pour exécuter ses dernières volontés...

Une fresque féroce et touchante, qui raconte l'Afrique du temps des explorateurs à nos jours.
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Les contes de l'arbalète

Les contes de l'arbalète
K. Chesterton G.
Ed. Age d'homme

Les Contes de l'Arbalète, au nombre de huit, sont autant de travaux herculéens s'imbriquant les uns dans les autres. Ils ont pour héros des personnages qui se sont donné pour tâche de relever un défi : accomplir une chose réputée proverbialement impossible. Le proverbe est le point de départ de l'histoire du syllogisme, du théorème, et le narrateur nous tient en haleine comme Shéhérazade tenait le sultan en suspens. C'est ainsi qu'au Moyen Âge, une dame n'accordait sa main qu'au chevalier qui avait réussi à triompher d'un certain nombre d'épreuves. Ces personnages forment à leur insu une autre table ronde, une société secrète de conspirateurs contre les puissances établies de la Banque et de la City.

Tels les dieux d'Homère, ils sont auréolés d'une protection spécifique qui tient à la fois du cérémonial et de la magie. Insensibles aux fatigues de tant d'aventures où les jette inlassablement leur créateur, ils semblent infiniment dispos pour de nouveaux jeux.

La fantaisie la plus échevelée y est bridée par une armature théologique des plus orthodoxes. C'est ainsi qu'enchaîné, l'oiseau peut voler. G. J.
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Lettres à Germaine Lucas-Championnière

Lettres à Germaine Lucas-Championnière
Dos Passos John
Ed. Gallimard/Arcades

Mademoiselle,

S'il vous plaît, qui est Darius Milhaud ?

Les jeunes gens se sont rencontrés en juin 1919 à un concert Koubitzky, salle Gaveau. L'armistice conclu, Dos Passos est à Paris en attendant sa démobilisation. Il a vingt-trois ans et profite de l'euphorie artistique qui règne dans la capitale au lendemain de la guerre. Passionnée de musique comme lui, excellente pianiste, Germaine Lucas-Championnière est une jeune femme de vingt-quatre ans issue d'une vieille famille de la noblesse vendéenne. Elle vit en dilettante, fréquentant des artistes et cultivant la mondanité. Le lendemain du concert, Dos Passos est invité à prendre le thé chez elle. Ils parlent musique, Germaine se met au piano, et une question anodine sur Darius Milhaud amorce une correspondance de cent soixante lettres, échangées pour la plupart entre 1919 et 1929.

Au cours de cette décennie, Dos Passos est sur la route : Espagne, Portugal, Iran, Irak, Syrie, Algérie, Maroc, Mexique, Russie... À chaque halte, il envoie un mot, un dessin, une carte postale ou une longue lettre. Attaché à la légèreté qu'ils entretiennent à deux, il écrit là où on ne l'attend pas : avec beaucoup de fraîcheur, il décrit et raconte, témoignant d'une grande attention aux paysages, aux décors, aux ambiances, au pittoresque et à la drôlerie de certaines situations.

Sans inhibitions, il croque dans la langue française comme dans la musique et dans les paysages. Il impose son style et nous charme.
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La grande époque

La grande époque
Dos Passos John
Ed. Gallimard/L'imaginaire

Roland Lancaster fut naguère un journaliste de renom, capable d'influencer par ses articles la politique même des États-Unis. Aujourd'hui, c'est un homme usé qui débarque à Cuba, après la mort de son épouse, pour tenter sa dernière chance : un reportage sensationnel. Il s'éprend d'une femme à la somptueuse chevelure, Elsa, et croit à un renouveau. Mais rien ne se passe comme prévu. Le fameux reportage n'intéresse personne, Roland a perdu sa notoriété, n'arrive pas à communiquer avec Elsa, trop frivole, capricieuse et attirée par l'alcool, les rituels magiques et les amis douteux. «Ro», aveugle face au présent, craignant l'avenir, se réfugie alors dans le passé. À travers ses évocations nostalgiques de la guerre dans le Pacifique, du procès de Nuremberg ou de la vie à Washington à l'époque de Roosevelt, c'est la «grande époque» qui transparaît et disparaît tout en même temps.

John Dos Passos nous livre ici un de ses ouvrages les plus mûrs, un des plus puissants et des plus riches par son étude de la nature humaine, où Lancaster ne serait finalement qu'un prête-nom à peine déguisé pour faire entendre le cri de l'écrivain.
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L'expérience du docteur Heidegger

L'expérience du docteur Heidegger
Hawthorne Nathaniel
Ed. Sillage

Avez-vous jamais entendu parler de la Fontaine de Jouvence, demanda le docteur Heidegger, celle que Ponce de Le(...)n, l'aventurier espagnol, a recherchée voilà deux ou trois siècles ? Si mes informations sont bonnes, elle se situe au sud de la péninsule de Floride, dans les environs du lac Macao.

Nathaniel Hawthorne (1804-1864) retrouve le mythe de la Fontaine de Jouvence et offre à son lecteur ce conte grinçant que Poe décrit comme « excessivement bien conçu, et exécuté avec une habileté sans pareille ».
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Le jardin enfumé. Et autres nouvelles

Le jardin enfumé. Et autres nouvelles
K. Chesterton G.
Ed. Arbre vengeur

On peut aveuglément se fier à Borges quand il déclare que Chesterton est le premier écrivain de notre temps, et on doit le croire lorsqu'il loue son génie de l'invention, sa virtuosité, son imagination visuelle.

Ce «Grand Voyant de l'Invisible» (F. Rivière) qui se rit des convenances et des règles aime brouiller les pistes comme dans les trois nouvelles de ce recueil, qui combinent ambiance merveilleuse et registre policier.

Surdoué de l'épure, audacieux dans ses digressions, révolutionnaire dans sa vision de notre monde, Chesterton possède ce don de provoquer le plaisir en chatouillant notre intelligence. Indémodable, le voilà dans notre siècle plus actuel que jamais. Ces trois joyaux dénichés dans sa collection de chefs-d'oeuvre le prouveront aux chanceux qui vont enfin le découvrir et le confirmeront à ceux qui connaissent depuis longtemps son importance dans la littérature anglaise.
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