Le cirque chaviré

Le cirque chaviré
Magnani Milena
Ed. Liana Levi

Branko le Hongrois, dans ses cartons, transporte un cirque. Alors des grappes d'enfants du campement tsigane où il débarque un soir le suivent comme une ombre. Pour eux, et surtout pour la petite Senija, il raconte l'histoire de la splendeur du Kék Cirkusz, le cirque de son grand-père. Avant que la Seconde Guerre mondiale et son cortège de pogroms et de trahisons ne le réduisent à ces quelques boîtes dérisoires. Il raconte avec la voix fébrile de quelqu'un qui espère avoir assez de temps pour transmettre son héritage. Aussi, quand dans ce bidonville en bordure d'autoroute, il sent par sept fois un poignard le transpercer, il ne peut se résoudre à quitter la scène. Portée par une langue aux multiples accents, à l'image de ce camp rom, Milena Magnani nous livre une épopée moderne, qui parle de mémoire, de transmission et d'espoir pour ces éternels laissés-pour-compte d'une magnifique humanité.

La ballade de Jesse

La ballade de Jesse
Bell Madison Smartt
Ed. Actes Sud

Jesse a vingt ans, d'amers souvenirs familiaux, Kurt Cobain pour héros et la musique comme unique compagne. A la suite de la défection brutale, juste avant le début d'une nouvelle tournée, du bassiste du groupe, Perry, le manager des Anything Goes, engage Jesse en catastrophe. Plus âgés que lui, les autres musiciens tiennent bientôt lieu à Jesse (le « melungeon », le métis) de famille d'adoption. Sur la route qui les mène tout au long de la côte est, au fil des concerts donnés dans les bars minables qui sont leur lot, le jeune homme fait l'expérience de la scène, des rivalités sur fond de bourbon et de bière, des chambres de motel pouilleuses, des conquêtes d'un soir, et des rencontres avec des spécimens d'humanité passablement cabossés par l'existence quels que soient leur sexe ou leur âge.

Avec ce road-novel dont la « bande-son » fait entendre les standards des grandes années du rock, de la country et du blues (de Hendrix à Clapton, des Rolling Stones à Nirvana ou de Joni Mitchell à Emmylou Harris, entre autres), Madison Smartt Bell met en scène un microcosme humain dont l'aventure collective, sur les routes d'un Deep South qui n'en a pas fini avec le racisme et le cynisme ordinaires, permet à un jeune métis au destin fracassé de se réconcilier enfin avec sa vie et le regard des autres à travers la musique. Dans cet émouvant « portrait de groupe » aux accents autobiographiques, Madison Smartt Bell laisse libre cours à une forme de simplicité et de tendresse jusqu'alors inédite dans son oeuvre et révèle, pour la première fois, le musicien, le chanteur et l'auteur de chansons qu'il est également.

's Nachts komen de vossen

's Nachts komen de vossen
Nooteboom Cees
Ed. De bezige bij

In 's Nachts komen de vossen dwaalt Cees Nooteboom naar mensen en gebeurtenissen uit het verleden : weg van de waan van de dag, weg van de levenden. Er is een prachtige lijn te ontdekken in het schrijverschap van Nooteboom. Waar in zijn debuutroman Philip en de anderen de jonge auteur op zoek ging naar de gebeurtenissen en stof zocht voor zijn schrijverschap, blikt hij nu terug en weet hij ontmoetingen, personen en gebeurtenissen te verwerven tot ragfijne, maar ook spannende verhalen.

Journal volubile

Journal volubile
Vila-Matas Enrique
Ed. Christian Bourgois

Le Journal volubile d'Enrique Vila-Matas transgresse allègrement les frontières du genre. L'auteur y sème des pépites dans lesquelles il explore le continent littéraire qui lui est le plus cher (Kafka, Sebald, Tavares, entre autres), raconte des voyages inattendus (la Finlande, la Slovénie) et évoque ses joies (ses lectures, ses amitiés) et ses peines (la progression de l'ignorance et de la sottise en Occident, la maladie). Le livre danse entre la fiction et l'essai à un rythme qui gomme toute frontière entre nos limites et l'aspiration à l'infini. Il invente un nouveau genre qui pourrait s'appeler le journal métaphysique.

'J'adore Dietario volubile. C'est un livre inclassable' (Pedro Almodovar)

'Un grand écrivain se débrouille toujours pour que ses plus puissants intérêts et ses plus intenses obsessions, ses grands amours et ses grandes détestations soient aussi les nôtres. Enrique Vila-Matas - avec une passion disciplinée et une jubilation non dissimulée, un peu à la Duchamp - y parvient dans son Journal volubile. (Rodrigo Fresan)

L'anneau et le livre/The Ring and the Book

L'anneau et le livre/The Ring and the Book
Browning Robert
Ed. Le bruit du temps

'Vous voyez ce vieux livre, jaune, carré, que je lance en l'air, que je rattrape, que je fais tourner en le tenant par ses plats de vélin ridé ? c'est du fait brut, sécrété par la vie humaine, quand des coeurs palpitaient fort, des cerveaux battaient, inondés par la montée du sang, il y a deux siècles. Voyez-le vous-même' Robert Browning, L'Anneau et le Livre, 1868-1869, Livre I

Journal 1973-1982

Journal 1973-1982
Oates Joyce Carol
Ed. Philippe Rey

Large fragment d'autobiographie de l'un des plus grands auteurs américains, le Journal de Joyce Carol Oates est un document littéraire de première importance. Elle l'entreprend à l'âge de trente-quatre ans, le Ier janvier 1973, tout en poursuivant ses oeuvres de fiction. Bien que détestant être qualifiée de prolifique, Oates écrit chaque jour avec une énergie fiévreuse : « Écrire est... une drogue, douce, irrésistible, et épuisante », dit-elle.

De ces lignes rédigées « au fil de la plume et spontanément » émerge un portrait non expurgé de l'artiste en femme, écrivain, professeur, amie. Oates parle de manière franche et très émouvante de son mariage - si heureux - avec Raymond Smith, de sa vie d'enseignante (à Windsor puis à Princeton), de son manque d'instinct maternel et des heures qu'elle passe au piano. Sa réputation croissante dans le monde littéraire l'amène à des rencontres et des amitiés avec des écrivains comme Philip Roth, John Updike, Susan Sontag, Joan Didion et bien d'autres. Mais, peu à l'aise avec les signes de la célébrité, Oates ne cesse de se réfugier dans sa vie intérieure, à la poursuite de son oeuvre. Une oeuvre dont ce Journal - qui égale celui de Virginia Woolf - est à coup sûr une pièce majeure.

Ce qui était perdu

Ce qui était perdu
O'Flynn Catherine
Ed. Jacqueline Chambon

1984. Kate Meaney est une petite fille hors du commun. Au lieu de fréquenter des enfants de son âge, elle joue les apprenties détectives dans les rues de Birmingham et les allées de Green Oaks, le tout nouveau centre commercial. Le reste du temps, elle s'amuse avec Adrian, son seul ami, un jeune homme attachant qui travaille dans un magasin du quartier, à scruter les clients et imaginer leurs troubles secrets. Jusqu'au jour où elle disparaît...

2003. Depuis des années, Kurt, agent de sécurité, contemple les masses somnambuliques venues tromper leur solitude dans l'immense piège de verre du centre commercial. Une nuit, il aperçoit l'image furtive d'une petite fille sur un écran de contrôle. Lisa, employée chez un disquaire, trouve quant à elle une peluche dans un couloir de service. Ensemble, ils se lancent à la recherche de la fillette. Dans les entrailles labyrinthiques de Green Oaks, ils vont tenter de retrouver ce qui était perdu : l'enfance, l'innocence, l'envie de vivre. Dans ce premier roman polyphonique, émouvant et drôle, Catherine O'Flynn file une inquiétante métaphore sur le monde dans lequel nous vivons.

« Ce qui était perdu épingle notre société de consommation dans toute son absurdité et son atroce tristesse. (...) Un grand roman d'un auteur extrêmement talentueux. » Jonathan Coe

 

Golden Gate

Golden Gate
Seth Vikram
Ed. Grasset

Le plus grand roman californien est ecrit en vers (et pourquoi pas ?) : Golden Gate est un enchantement. Gore Vidal

Ce roman se déroule au pied du Golden Gate.
Lieu : la Californie. Les années quatre-vingt.
Quelques Américains, sous l'oeil de Vikram Seth,
Cherchent le grand amour et bravent le destin.

Cette épopée moderne, où satire et romance
Entraînent le lecteur au coeur d'une expérience
Unique, est racontée en vers : sept cents sonnets
A peu de choses près, où tour à tour paraît

Et disparaît l'espoir, où le futur auteur
D'Un garçon convenable, autre roman épique,
Fait de San Francisco une cité mythique.

Le rire y est fréquent, aussi bien que les pleurs.
Savourez sa musique et oubliez l'exploit.
(Il est traduit ici pour la première fois.)

Julius Winsome

Julius Winsome
Donovan Gerard
Ed. Seuil/Cadre vert

Julius Winsome, quinquagénaire, vit solitaire dans un chalet au coeur de la forêt du Maine. Fils et petit-fils d'anciens combattants qui lui ont transmis leur horreur de la violence, Julius ne chasse pas, contrairement aux hommes virils de la région. Il préfère chérir ce que son père aimant lui a légué : les milliers de livres qui tapissent son chalet et le Lee-Enfield, ce fusil rapporté par son grand-père anglais des tranchées de la Première Guerre mondiale. Son unique compagnon est son chien Hobbes. La mort de ce dernier, abattu par un chasseur, déclenche chez cet homme doux une fureur meurtrière. Les balles crépitent alors dans la forêt enneigée. Julius Winsome est l'histoire tendue et émouvante d'un «étranger» à la fois hypersensible et détaché, amoureux de la langue et misanthrope. Avatar du Meursault de Camus, qui tuait «à cause du soleil», Julius Winsome tue à cause de la neige, symbole de pureté et de deuil.

Écrit dans un style puissant et poétique, ce récit d'amour, de vengeance et de mort est à l'image du paysage, âpre, froid, cinglant. C'est aussi un hymne à la nature et à ses créatures sauvages.

La fabrique des jeunes gens tristes

La fabrique des jeunes gens tristes
Gessen Keith
Ed. L'Olivier

À chacun sa génération perdue. Après les «jeunes gens tristes» de Scott Fitzgerald et les trentenaires survoltés de Jay McInerney, voici Mark, Sam et Keith, les anti-héros du premier roman de Keith Gessen.

Mark termine une thèse sur les mencheviks et consulte des sites pornographiques. Sam rêve d'écrire le «grand roman sioniste» mais perd beaucoup de temps à vérifier sa popularité sur Google. Keith soutient la candidature d'Al Gore. Tous trois possèdent le charme propre aux jeunes gens que leurs brillantes études ont condamnés à une lucidité aussi précoce qu'inutile.

Touchants, exaspérants, irrésistibles, ces trois garçons sont les protagonistes d'une nouvelle éducation érotique et sentimentale.

L'on ne saurait trop remercier l'auteur d'avoir pris le parti de la légèreté contre celui, si prévisible, de la gravité. Keith Gessen n'hésite pas à bousculer les vaches sacrées de l'avant-garde officielle, en lançant au passage quelques pétards sur les grognards de la gauche intellectuelle américaine, en toute injustice. Avec ce roman en forme de comédie, il rejoint d'emblée le peloton de tête d'une jeune littérature anglo-saxonne à l'esprit mordant.

Newsletter