Eva est née dans une petite ville de province norvégienne. Sa mère meurt en lui donnant naissance. Son père s'épouvante lorsqu'il aperçoit le nouveau-né : un abondant pelage lui donne l'aspect d'un lionceau. Eva souffre d'un syndrome rarissime : hypertrichosis lanuginosa congenita, ou hirsutisme. Tenue enfermée dans la maison, elle grandit dans une solitude peuplée de livres.
Mais elle est une anomalie, que le monde arrachera bientôt à ce cocon : l'école, la presse, la science s'acharneront sur son animalité, humiliant cruellement sa dignité. C'est paradoxalement dans une troupe de cirque qu'Eva pourra reconquérir son humanité.
Erik Fosnes Hansen orchestre son récit de main de maître. Tour à tour ironique et sarcastique, émouvant et troublant, il écrit un grand roman allégorique, sans aucun misérabilisme, un conte fantastique et cruel qui est pourtant un hymne à ce qu'il y a de plus humain dans l'homme.
Trainspotting à la danoise, Submarino explore le Copenhague underground à travers les destins de deux frères en quête d'une normalité dont ils ignorent tout.
Enfants des services sociaux, Nick et son frère se rencontrent à la sortie d'un foyer, le jour où leur mère décide de leur offrir un semblant de vie de famille. Très vite pourtant, elle tombe enceinte et reprend son errance de bar en bar, de passe en passe. Livrés à eux-mêmes, les deux frères s'occupent du bébé avec les moyens du bord. Quand le petit crie trop fort, ils mettent la télé à fond et sniffent de la peinture. Mais un jour le bébé ne crie plus : il est mort.
Des années plus tard, Nick traîne son corps bodybuildé et rongé par l'alcool dans les basfonds de Copenhague. Son frère, héroïnomane, élève seul son fils et prend la tête d'une petite armée de dealers. Tous deux se débattent pour survivre à ce terrible passé et tenter d'échapper, en vain, à la marginalité.
Chronique violente et sans concession, Submarino dissèque les vies de ces êtres mal nés, héritiers malgré eux d'une misère sociale dont ils ne parviennent pas à s'extraire. Un livre coup de poing auquel le cliché d'un Danemark pays-le-plus-heureux-du-monde ne résiste pas et dont on peine à sortir indemne.
Buenos Aires, 1968. Liliana Emma Colotto, enceinte de quelques semaines, est sauvagement violée et étranglée. Benjamín Chaparro, jeune secrétaire au palais de justice, se voit confier l'affaire. Pour tenter d'oublier ses amours contrariées avec Irène, une collègue au charme magnétique, les divagations de son voisin de bureau alcoolique et l'étroitesse d'esprit de sa hiérarchie, Chaparro se lance à corps perdu dans ce sulfureux dossier. Peu à peu, cet homicide devient son obsession : bouleversé par la souffrance du jeune époux de Liliana, il jure de faire condamner le meurtrier. Mais nous sommes dans les années 70, et l'Argentine, en proie à toutes les iniquités, s'enfonce dans la «guerre sale» et les années de plomb. Pour venir à bout de ce qui devient l'affaire de sa vie, Benjamin devra affronter inimitiés politiques, trahisons et exil. Trente ans plus tard, il décide de coucher le terrible récit de ce crime sur le papier.
Campé dans l'Argentine de la dictature, Dans ses yeux est une magnifique histoire d'amour doublée d'une brûlante réflexion sur la légitimité de la vengeance.
Pour la dernière fois, Mack et sa femme, Vonnie, partent camper dans les montagnes du Wyoming afin de se dire adieu. Enlisé dans les dettes et l'alcool, Mack a peu à peu contraint Vonnie à renoncer à l'amour profond qui l'avait attirée vers l'Ouest, et la jeune femme a refait sa vie. Cette randonnée est un moment de complicité retrouvée, une ultime chance de se dévoiler l'un à l'autre.
Pour Mack, cette expédition est aussi l'occasion d'exécuter une dernière mission pour le compte d'un intermédiaire douteux afin de sauver son ranch de la faillite. Au coeur des vastes étendues sauvages, guidé par un faible signal GPS, il doit retrouver une mystérieuse balise égarée lors d'un survol de la région. Mais cette mission se révélera bien plus périlleuse que prévu.
Le Signal est un roman magistral combinant le destin d'un amour qui s'achève avec un suspense qui nous mène au paroxysme de l'angoisse. Un livre palpitant qui se lit d'une traite.
Frappée par une attaque cérébrale sur ses vieux jours, la mère de l'auteur perd sa langue : elle s'exprime désormais en un baragouin furieux et inintelligible, qui traduit son désespoir et sa colère d'être incomprise. Durant toute son existence, cette commerçante, bouchère à Saint-Nicolas, bourg de la province d'Anvers, a été actrice dans une compagnie d'amateurs. La langue était son instrument. Elle la maniait en virtuose au théâtre comme dans la vie où sa volubilité et son sens de la repartie, combinés à un caractère bien trempé et autoritaire, faisaient d'elle un personnage haut en couleur et parfois redoutable.
Istanbul était un conte. Saga familiale, livre-fleuve, déambulation intime et roman-monde, Istanbul était un conte est tout cela à la fois. Issu d'une famille juive séfarade arrivée à Istanbul au moment de la Reconquista, l'écrivain plonge dans la mémoire de sa ville natale comme s'il ouvrait une malle aux trésors.
Les objets, les tableaux et les photographies sépia s'animent, et c'est la vie quotidienne de trois générations de Juifs stambouliotes au cours du XXe siècle qui prend forme. Il faut accepter de se perdre dans les ruelles étroites de la ville, sur les rives du Bosphore et dans les méandres des histoires familiales : au gré des errances du narrateur, dévoilant à travers mille récits et anecdotes les secrets de chacun de ses quarante-sept personnages (qu'il inventorie dans un lexique en début d'ouvrage), le charme agit.
Istanbul est un conte, comme le sont les aventures, réelles ou rêvées, de ses habitants. D'une histoire à l'autre, se dessine le portrait d'une ville-monde, mais aussi son évolution vers la modernité. La ville cosmopolite et accueillante pour les communautés étrangères change au fil des ans, tandis que retentissent jusque dans le coeur des foyers les tragédies du siècle.
Puissamment nostalgique, le livre de Mario Levi tente, et ce n'est pas son moindre attrait, de sauver un monde englouti, un monde de commerçants parlant encore le yiddish et le ladino, un monde où cohabitaient toutes les traditions et toutes les religions.
Istanbul était un conte est le chant d'amour de l'écrivain à sa ville, en même temps qu'une formidable invitation au voyage.
31 décembre 1999. Un enfant sur le point de naître repousse l'instant de sa venue au monde pour la faire coïncider avec le passage à l'an 2000. Ce bébé a l'imagination fertile et l'affabulation facile. De plus, il a hérité de sa grand-mère un don d'extralucide, il peut donc raconter la vie de ses parents - deux adolescents de dix-sept ans, Mehdi Ayoub et Diana Knuvelder -, celle de ses grands-parents Ayoub, Marocains installés à Rotterdam depuis de nombreuses années, comme celle de ses grands-parents bataves. Ainsi défilent le destin agité de la famille Ayoub - les aventures de Driss, le grand-père boucher, et ses projets de pèlerinage, ses déboires au volant -, les histoires du quartier, celles des amis de Mehdi comme celles de certains disparus. Dans ce foisonnement de personnages marocains et hollandais se rencontrent deux mondes, cependant que se succèdent une multitude d'épisodes à la chronologie bouleversée bien qu'en équilibre parfait sur le fil conducteur offert par l'attente de la fameuse naissance...
Ce livre a été qualifié par la critique de chronique familiale à la García Márquez. Abdelkader Benali tente en effet très consciemment de faire entrer une culture étrangère dans un cadre néerlandais par le biais d'une langue à la luxuriance baroque et d'une logique pleine de merveilleux. La sympathie qu'éprouve l'auteur pour ses personnages et son optimiste exempt de moralisme sur la cohabitation des cultures fait de ce roman un livre original et particulièrement attachant.
Il a toujours vu la photo de son père sans jamais se poser de question. Et brusquement, l'adolescent de seize ans s'interroge sur ce père mort à sa naissance. C'était un suicide, il le sait, mais sa mère n'aime pas en parler. Sans avertir ses parents, ce garçon sage, qui n'a jamais fugué, décide d'aller à Paris interroger André, le meilleur ami de son père. Et en reconstituant l'histoire de cette vie brisée, il découvre une autre époque. Une époque où être «différent» pouvait conduire à l'internement. Une époque où l'on se mariait pour cacher des désirs coupables. Une époque où l'on pouvait vous faire chanter, détruire votre vie et vous faire préférer la mort au scandale.
Le souffle de la tragédie traverse ce roman car le destin du père était inéluctable, mais sa mémoire sera sauvée grâce à l'amour de ce fils qu'il n'a jamais connu.
Enniscorthy, Irlande, années 1950. Comme de nombreuses jeunes femmes de son âge, Eilis Lacey ne parvient pas à trouver du travail. Par l'entremise d'un prêtre, on lui propose un emploi à Brooklyn, aux États-Unis. Poussée par sa famille, Eilis s'exile à contrecoeur. Au début, le mal du pays la submerge. Mais comment résister aux plaisirs de l'anonymat, à l'excitation de la nouveauté ? Loin du regard de ceux qui la connaissent depuis toujours, Eilis goûte une sensation de liberté proche du bonheur. Puis un drame familial l'oblige à retraverser l'Atlantique. Au pays, Brooklyn se voile de l'irréalité des rêves. Eilis ne sait plus à quel monde elle appartient, quel homme elle aime, quelle vie elle souhaite. Elle voudrait ne pas devoir choisir, ne pas devoir trahir.
À Delhi, en 2006, le sikh Kirpal Singh - Kip - apprend dans le même temps qu'il souffre d'une tumeur au cerveau et qu'il est invité par son ancien employeur, le général Kumar, à revenir au Cachemire qu'il a fui quatorze ans plus tôt. Ce dernier lui demande de cuisiner le repas de noces de sa fille Rubiya.
Bercé par le rythme lent et monotone du train qui l'emporte vers Srinagar à travers les paysages du nord de l'Inde, Kip se remémore les plus belles années de sa vie. Il avait dix-neuf ans quand il est arrivé au Cachemire, encore un paradis sur terre, sur les traces de son père, officier dans l'armée indienne, mort en héros lors d'un accident d'hélicoptère sur le terrible glacier de Siachen.
Mais Kip n'est pas un militaire, c'est un esthète qui, sous les ordres du chef cuisinier Kishen, son mentor, fou de Beethoven, perce les secrets des épices dans la cuisine indienne, raffinée et complexe. Sa formation passe également par la découverte du corps des femmes mûres et la tension entre Indiens et Pakistanais sur le redoutable glacier...
Jusqu'à cette après-midi inoubliable, dont le souvenir l'oppresse toujours, où Kip croise Irem, cette « terroriste » pakistanaise à la longue chevelure d'ébène...
Obsédant, sensuel, mélancolique et lyrique, Chef est un joyau cachemiri aux senteurs de gingembre, de piments, de coriandre et de fenugrec sur l'initiation, la mémoire, l'amour et l'espoir.