Depuis le comptoir d'un bar glauque de Los Angeles s'élève la voix, anonyme, de celui qu'on paie en ces lieux pour déverser nuit après nuit des fleuves d'alcool dans les verres que tendent vers lui les pochards, camés, prostituées, dealers et amateurs de combines dangereuses et illégales en tous genres, venus affaler sur un tabouret le corps déglingué qui abrite leur misère comme leurs espoirs ou les rêves baroques et téméraires dont ils réenchantent sans fin leur voyage au bout de la nuit.
Présentés comme une série de notes pour un roman à venir que rédige un barman au moins aussi allumé que ses hallucinants clients, les chapitres se succèdent au rythme, effréné, où l'alcool et la cocaïne se consomment dans de tels parages. D'emblée inclus dans cette spirale toxique, le lecteur partage bientôt les vertiges du narrateur-barman s'imbibant à son comptoir des fictions de sa propre vie...
Loin de succomber, pourtant, à l'égarement dont il semble être la proie, jamais ce spectateur prétendument innocent de la violence du monde et amateur de mystérieuses pilules blanches dont il agrémente ses nombreux whiskys quotidiens ne parvient à l'état d'anesthésie auquel il aspire. Et, aussi monstrueux et éperdus que paraissent ces réfugiés de la nuit, c'est toujours avec une tendresse certaine que son regard les fait surgir, par-delà leur déchéance et leurs défaillances, dans leur humanité profonde.
Servies par une écriture somptueuse, ces 'ablutions' en forme de descente aux enfers constituent, sur le thème de la marginalité dans tous ses états, une variation brillante et originale dans laquelle le génie dionysiaque de l'affabulation investit une réalité dont l'écrivain a pu prendre toute la mesure pendant les six années qu'il a lui-même passées dans les fonctions exercées par son narrateur...
Cherchant la paix après un douloureux chagrin d'amour, un étranger s'installe dans un village perdu de la campagne française, où le temps semble être suspendu. Mais la tranquillité et le charme de Courtillon s'avèrent vite trompeurs...
Tout part d'un projet d'aménagement qui divise le conseil municipal et tourne à la querelle de village. Soudain, la marche du temps s'affole et le passé ressurgit : tentatives de corruption, adultère, suicide, meurtre. Les villageois taiseux en savent plus long que ce qu'ils veulent bien dire...
«C'est toute l'histoire du village que l'on voit imperceptiblement prendre forme, une histoire de fautes, de déviances et de crimes : lorsque Charles Lewinsky, dans cette prose riche et limpide qui est la sienne, se fait conteur, il est difficile de reposer le livre avant la fin.»
Stuttgarter Nachrichten
On trouvera ici la seule édition complète en français de l'éblouissante correspondance du poète John Keats (1795-1821), mort à 26 ans de la tuberculose. Bouleversantes, ses lettres à Fanny Brawne brûlent d'un désir de vivre et d'aimer que seules éteindront la maladie, puis la mort.
Pour ses frères et sa soeur, Keats invente, au fil des jours, la lettre-journal, qui raconte, décrit, et parfois s'épanouit en poème. À ses amis - peintres, poètes, critiques - sans nulle pose, entre mille anecdotes ou plaisanteries, il offre des pensées qui nous sont aujourd'hui aussi précieuses que celles d'un Baudelaire ou d'un Mallarmé.
Un des dialogues amoureux les plus enchanteurs et les plus intelligents de la littérature contemporaine. Der Spiegel
Un message anodin peut-il bouleverser votre vie ?
Leo Leike reçoit par erreur un mail d'une inconnue, Emmi Rothner. Poliment, il le lui signale. Elle s'excuse et, peu à peu, un dialogue s'engage, une relation se noue. Au fil des mails, ils éprouvent l'un pour l'autre un intérêt grandissant.
Leo écrit : « Vous êtes comme une deuxième voix en moi qui m'accompagne au quotidien. »
Emmi admet : « Quand vous ne m'écrivez pas pendant trois jours, je ressens un manque. »
Emmi est mariée, Leo se remet à grand-peine d'un chagrin d'amour. De plus en plus attirés l'un par l'autre, Emmi et Leo repoussent néanmoins le moment fatidique de la rencontre...
« C'était le paysage humain qui l'émouvait. Il semble que la Beauté, pour toucher les sens de Flush, dût être condensée d'abord, puis insufflée, poudre verte ou violette, par une seringue céleste, dans les profondeurs veloutées de ses narines ; et son extase, alors, ne s'exprimait pas en mots, mais en silencieuse adoration. Où Mrs. Browning voyait, Flush sentait ; il flairait quand elle eût écrit. »
Virginia Woolf, Flush : une biographie, 1933.
« Les vagues qui se brisent semblaient être le geste même de la nuit : elle secoue la tête et désespérément en laisse tomber la ténèbre, et médite, et gémit, comme pour pleurer le destin qui a noyé la terre, éteint toutes ses lumières, et de tous ses bateaux et ses villes n'a laissé rien. La vague monte et balaie la grève ; la nuit pleure l'humaine tristesse ; la beauté de la mer console ; ainsi le vent a répondu peut-être au dormeur, au rêveur qui s'avançaient sur la grève et demandaient : pourquoi nous envelopper dans la beauté de la mer, pourquoi nous consoler de la lamentation des vagues qui se brisent, si en vérité nous ne filons ce vêtement que de terreur, si nous ne tissons cet habit que pour le néant ? »
Virginia Woolf, « Le temps passe », 1926.
Ce cahier est l'aboutissement d'une aventure éditoriale commencée en mars 2008, lorsque José Saramago, le prix Nobel portugais de littérature, inaugure son blog, très vite suivi avec ferveur par des lecteurs qui y retrouvent l'intelligence et la lucidité de l'écrivain, mises au service de l'observation sans concession de notre monde actuel.
La politique internationale, Obama, Sarkózy, l'Europe, le conflit israélo-palestinien... les petites et grandes stratégies des puissants de ce monde sont décryptées par l'un des auteurs contemporains les plus engagés, et la force et l'expression de certains portraits ne laissent pas indifférent, poussant même le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi, à interdire à un éditeur de son groupe de publier l'ouvrage en italien. Il ne s'agit pas ici d'une compilation de chroniques, mais d'un vrai « livre de vie », selon l'expression de l'épouse de José Saramago. Une occasion rare de partager une écriture superbe et dense, sans fioritures, ainsi qu'une intelligence du monde à la fois intime et universelle.
« Tout le XXe siècle en un seul roman. Un livre étonnant ! »
Richard Powers
Nous sommes en 1995, à Potsdam. Paul Andermans, un jeune psychologue flamand qui s'est fait agresser par des néonazis, rencontre à l'hôpital Jozef de Heer un survivant de l'Holocauste. Ce dernier va lui raconter sa vie : la montée du nazisme, la clandestinité, les camps, puis une étrange carrière de magicien sur fond de mur de Berlin.
Au même moment, le physicien Goldfarb, qui participa à l'élaboration de la première bombe atomique, se souvient lui aussi du long périple qui l'a conduit jusqu'à Berlin - Berlin où quelque chose d'incroyable se prépare... C'est le début d'une oeuvre exubérante, bouleversante et terriblement intelligente.
Roman épique plongé dans le bain acide du XXe siècle et de ses horreurs, Oméga mineur a reçu le prestigieux Independent Foreign Fiction Prize. C'est incontestablement l'une des révélations romanesques les plus fortes de ces dix dernières années.
« Un roman comme il n'en paraît que tous les dix ans. S'il fallait chercher une comparaison, on pourrait citer Outremonde de Don DeLillo ou L'Arc-en-ciel de la gravité de Thomas Pynchon. » Boyd Tonkin
«Étourdissant. Peut-être le plus grand roman jamais écrit sur la prison.» James Ellroy
Dans la lignée de la série OZ, le chef-d'oeuvre du thriller carcéral, par l'auteur de La Religion.
Green River, un pénitencier de sécurité maximale au Texas. Un univers sans pitié où le silence n'existe pas, l'obscurité non plus. Un véritable enfer, entre tensions raciales et violences quotidiennes, dans lequel vivent cinq cents âmes perdues. C'est ici que Ray Klein, ancien médecin, purge sa peine. Alors que sa libération approche, une émeute éclate dans la prison. Au milieu du chaos et de l'anarchie, Ray, qui est tombé amoureux de Juliette Devlin, psychiatre judiciaire, va tout mettre en oeuvre pour sauver la jeune femme séquestrée avec ses patients dans l'infirmerie.
Avec ce huis clos impitoyable peuplé de figures effrayantes, depuis John Campbell Hobbes, directeur de prison psychorigide, jusqu'à Henry Abbott, meurtrier schizophrène, Tim Willocks nous offre un portrait terrifiant de la vie carcérale. Il nous donne surtout un thriller prodigieux, au rythme haletant et au suspens oppressant.
«Willocks a un véritable don pour faire vivre ses personnages. Un roman extrêmement impressionnant !» William T. Vollmann
Née en 1955, Katharine Weber a commencé par écrire des nouvelles qui furent publiées dans diverses revues américaines, dont le New Yorker. Dans son deuxième roman, Jeune femme au luth, Patricia Dolan, historienne de l'art américaine, se retrouve seule dans un cottage irlandais face à la mer, gardienne d'un tableau de Vermeer volé à la collection royale britannique par un groupe de l'IRA. Ce livre a été traduit en douze langues et a reçu de nombreuses distinctions.
19 janvier, pluvieux. Elle est belle. Rien au monde, absolument rien, n'est plus intéressant à étudier qu'un visage. Son regard me fascine, m'aimante, me tient prisonnière. Il fait froid, sombre, humide. Pourquoi suis-je ici ? Pour quoi faire ? Dans ces journées si courtes de janvier, la campagne entière, avec ses moutons, ses cochons, ses vaches, semble plongée dans un désespoir hivernal. Le vent coupant, glacé, souffle jusque dans mes os. Je me demande par moments si j'arriverai un jour à me réchauffer. Je regarde mon visage dans le miroir et il me paraît lointain, flou, moins réel que le sien. Je rentre à l'instant de chez O'Mahoney, la boutique la plus proche, quatre miles aller-retour sous une pluie battante. J'y ai acheté de l'épicerie, un journal, et ce livre de comptes (le seul carnet qu'il avait en rayon) où je retranscris mot pour mot la conversation que je viens d'avoir avec M. O'Mahoney, la première de la journée : «Avec cette haie de fuchsias qui a envahi le carrefour, que le (...)